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Ainsi, en regard de ce que nous vu, la Législation tient compte notamment du ‘udhr bi el jahl, avant de condamner un musulman à l’apostasie. S’il existe certes une divergence sur le sujet, il n’en demeure pas moins que des grands spécialistes, avec à leur tête ibn Taïmiya penche vers cette opinion. Ce dernier, comme le souligne deux grands érudits contemporains, Mohammed Amân el Jâmî (34) et Mohammed ibnSâlih el ‘Uthaïmîn, est peut-être celui qui a le plus, pour ne pas dire le mieux, développé la question.

 

Il explique notamment que, non seulement les anciens en commençant par les Compagnons, tenaient compte de ce paramètre, mais ils ne faisaient pas de distinction en cela, entre les usûls et lesfurû’, à l’inverse des innovateurs qui furent suivis par certains traditionnalistes. Comme ils ne faisaient pas de différence entre les questions élémentaires de la religion et les autres. En cela, le shirk n’est pas épargné par ce principe. En outre, il distingue certes dans la majeure partie des cas entre les questions subtiles et les questions évidentes de la religion, mais il ne faut pas en faire une règle qui s’appliquerait à tous les cas. La chose est en effet relative. Elle varie en fonction des personnes et des époques. Sans compter que ce qui est évident pour les uns ne l’est pas forcément pour les autres. La preuve, c’est qu’ibn Taïmiya fait exception du nouveau converti et du Bédouin qui habite loin des villes. Là non plus, ce n’est pas une règle, c’est le constat pour la majeure partie des cas, car d’autres textes parlent des périodes où la lumière de la Révélation s’est estompée…

Ou pourrait donc se servir de tous ces éléments pour définir un vrai paramètre sur le sujet, wa Allah a’lam !

 

Quant à savoir si certains ignorants ne sont pas excusables en raison de leur négligence ou autre, c’est encore un autre sujet. Néanmoins, il convient de distinguer entre le fait d’être coupable d’un péché en raison d’une négligence constatée, mais sans devenir pour autant mécréant, comme le rappelle ibn Taïmiya. S’il existe des cas où l’ignorant n’est pas excusable, là encore, ce n’est pas une règle générale. Sans compter qu’il est matériellement très difficile de vérifier l’état de négligence…

 

En mettant les passions de côté, l’analyse scientifique réclame d’avoir le courage, mais aussi l’objectivité, de n’attribuer aucune autre opinion à ce grand Imam. Au pire des cas, il faudrait avouer franchement qu’il s’est trompé, ou pour le moins qu’on n’adhère pas à sa tendance. Si notre message s’adresse à la partie adverse la plus modérée, il ne peut concerner les ultras, qui verraient leur tendance s’écrouler d’elle-même. Nous concevons, certes, que son discours puisse aller à l’encontre de certains savants najdites, mais, pour comprendre sa pensée, il faut non seulement utiliser toutes ses paroles, mais faire la différence entre le hukm el mutlaq, comme nous disons toujours, et le hukm el muqaïdtakfîr e-naw’ et takfîr el mu’ayin, mais aussi, el hukm e-zhâhir et le hukm el bâtin. Or, son discours s’accorde certes avec le leur pour la grande majorité des cas, mais il ne serait pas juste d’en faire un principe immuable qu’on ne pourrait déroger. La difficulté, c’est de cerner les points de différences, chose qui n’est pas facile, et qui a échappée à de nombreux savants parmi les générations récentes.

 

Lui-même explique à ce sujet : « Par ailleurs, certains savants de notre école des nouvelles générations ont divergé sur la question de savoir si la personne ayant commis un acte de kufr, est vouées à l’Enfer éternel. La plupart estime que oui, comme le stipule un certain nombre d’anciens spécialistes en hadîth, à l’exemple d’Abû Hâtim, Abû Zur’â et de bien d’autres. D’autres désapprouvent ce jugement.

 

La raison à l’origine de cette divergence, c’est que les textes se « contredisent » à leurs yeux. Ils sont confrontés à des textes qui réclament de kaffar les auteurs de certaines paroles, mais au même moment, ils voient que certains d’entre eux avaient une foi telle, qu’ils n’étaient pas concernés par ce statut. Ainsi, les textes s’opposaient.

En réalité, ils avaient raison de prononcer un jugement absolu, comme l’ont fait ces fameux Imams avec les textes scripturaires ; ils disaient en effet que celui qui dit telle chose est un kâfir. À les entendre, ils donnaient l’impression à ces savants que ce jugement englobait tous les cas possibles. Cependant, ils ne sont pas mis à l’esprit que le takfîr est soumis à des conditions à remplier et à des restrictions à exclure pour chaque cas particulier.

Ainsi le takfîr el mutlaq (absolu) n’implique pas forcément le takfîr el mu’ayin (particulier), sauf dans la situation où toutes les conditions pour le faire soient remplies et où toute restriction obligeant à s’abstenir soit en même temps exclue. »[1]

 

Si ce constat est valable à son époque, alors que dire des savants des générations encore plus éloignées de la Révélation. Il est donc possible que certains imams de la da’wa najdites ne soient en accord avec ibn Taïmiya sur certains détails du ‘udhr bi el jahl. C’est certainement ce qui a poussé Mohammed Rashîd Ridâ, en annotation à majmû’ e-rasâil e-najdiya à faire la conclusion suivante : « Cette restriction de la part du Sheïkh (en parlant de Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb ndt.) qui impose ici une compréhension minimum, dissipe la confusion qui s’impose à l’esprit en lisant d’autres passages de ses œuvres. En s’en tenant à ces derniers passages, certains savants du Najd soutiennent que la présence du Coran est suffisante pour établir la hujja contre les hommes, quand bien même ils ne comprendraient pas son message. Cette conception illogique s’oppose au Verset disant : [Celui qui s’écarte du Messager, après avoir distingué la bonne voie].[2]  Elle ne va pas non plus dans le sens des thèses soutenues par les grands spécialistes et disant qu’il est nécessaire de faire comprendre le prêche prophétique (da’wa) avec ses arguments, avant d’établir la hujja »[3]

 

Quand aux ultras qui ont suivi ces fameux savants, ils vacillent comme le dit ibn Taïmiya entre l’ignorance et l’injustice. Beaucoup d’entre eux sont sûrement excusables, mais pour les autres, leur sort est entre les Mains d’Allah. En tout cas, si eux nous considèrent comme des kuffars, le contraire n’est pas vrai. Sheïkh el Islâm fait l’extraordinaire conclusion : « Les kharijites kaffar la jamâ’a (les traditionalistes ou les musulmans, ou peut-être les Compagnons ndt.), comme les mu’atazilites et les rafidhites kaffar leurs opposants : au meilleur des cas, ils les considèrent comme des pervers (tafsîq). Ainsi, les gens des passions innovent une tendance et vouent à l’apostasie tous ceux qui s’y opposent. Quant aux traditionalistes, ils suivent la vérité de leur Seigneur qui leur est venu du Messager (r). Ils ne kaffar par leurs opposants ; ils connaissent mieux la vérité que tout le monde, et sont les plus cléments envers les hommes. »[4]

 

Wa Allah a’lam !

 

Par : Karim ZENTICI

 

 

 

 


 

[1]Mujmû’ el fatâwâ (12/487-488).

 

[2] Les femmes ; 115

 

[3]majmû’ e-rasâil e-najdiya (5/638).

 

[4]Manhâj e-sunna (5/158).

RÉSUMÉ SUR LE 'UDHR BI AL DJAHL

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