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Louange à Allah le Seigneur de l’Univers ! Que les Prières et le Salut d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur ses proches et tous ses Compagnons !

 

Voir : qurrat el ‘uyûn de Salîm el Hilâlî

 

Voici une analyse technique de l’annale d’ibn ‘Abbâs qui fait tant débat de nos jours ; il en existe deux voies pour ceux qui n’en seraient pas convaincus, sans compter les paroles des tâbi’îns venant l’appuyer.

 

La première voie passe par Tâwûs selon ibn ‘Abbâs :

 

Selon ibn ‘Abbâs au sujet du Verset : [Ceux qui n’appliquent pas les Lois d’Allah sont eux les mécréants] : « Ce n’est pas la mécréance à laquelle vous pensez. »[1]

Selon une version : « Ce n’est pas la mécréance à laquelle vous pensez, mais il s’agit de la mécréance qui ne fait pas sortir de la religion. [Ceux qui n’appliquent pas les Lois d’Allah sont eux les mécréants] ; Il s’agit de la mécréance sans n’être de la mécréance »[2]

 

El Hâkim a authentifié sa chaine narrative dans el mustadrak,[3] et e-Dhâhabî lui a accordé son jugement. Ibn Kathîr rapporte le commentaire suivant d’el Hâkim et auquel ne s’est pas opposé e-Dhâhabî : « Hadith authentique qui répond aux conditions de Bukhârî et de Muslim. »[4]

 

Or, qu’en est-il de la crédibilité du fameux Hishâm ibn Hujaïr qui fait tant débat ? C’est ce que nous allons voir dans les prochaines lignes.

 

Voici ce que les savants disent de lui :

 

-          Ibn Shubruma : « Il n’y a personne comme lui à La Mecque. »[5]

-          El ‘Ijlî : « Crédible, et partisan de la sunna. »

-          Yahyâ ibn Ma’în : « Sâlih » ; ce qui veut dire qu’il est pieux ou bon.

-          Abû Hâtim e-Râzî : « On peut écrire son hadîth. »

-          Ibn Sa’d : « Crédible ; il est l’auteur de certains hadîth. »

-          Ibn Shâhîn : « Crédible. » ; thiqa.

-          Ibn Hibbân l’a considéré crédible.

-          E-Sâjî : « Il est honnête. » ; sadûq qui est à un échelon moins élevé que thiqa.

-          e-Dhâhabî : « Crédible. »

 

Le grand spécialiste ibn Hajar el ‘Asqalânî résume l’opinion des savants sur lui : « Il est honnête, mais il peut se tromper. »

 

Des spécialistes de la critique de rapporteurs, à l’instar de Yahyâ el Qattân, l’Imâm Ahmed, et ibn Ma’în – selon l’une de ses opinions – le considèrent faible.[6]

 

Ainsi, au pire des cas, faute d’être authentique, son hadîth ne dépasse pas le stade de « bon » (hasan), dans la mesure où il ne va pas à l’encontre d’autres rapporteurs ; surtout si l’on sait qu’il entre dans la panoplie des rapporteurs des deux plus grands recueils des musulmans, el Bukhârî et Muslim en l’occurrence. En sachant que pour le hadîth qui nous intéresse, d’autres hadîth-témoins viennent le renforcer, comme nous allons le voir.

 

Réponse aux objections :

 

A- L’avis de l’Imâm Ahmed

 

Alors certes l’Imâm Ahmed émet certaines réserves sur son cas, comme en témoigne son jugement sans appel : « laïsa bi el qawî. » Ailleurs, il signe en disant : « laïsa bi dhâk. » qu’on pourrait traduire : « Il n’est pas ce rapporteur qui est fort. » ou : « Il n’est pas ce fort rapporteur. »[7] Néanmoins, dans le jargon des traditionnistes, cela ne veut nullement dire qu’il est faible. Cette expression ne fait que mettre en avant que sa mémoire est faible, voire qu’elle s’est atténuée. Dans iqâmat e-dalîlSheïkh el Islâm ibn Taïmiya souligne que l’Imâm Ahmed émit ce jugement pour un autre rapporteur, connu sous le nom de ‘Utba ibnHumaïd e-Dhabbî el Basrî, en voulant dire que son hadîth passe de sahîh à hasan. notons qu’à l’époque, les savants classaient le hadîth en deux catégories : sahîh et dha’îf (faible). Il n’y avait pas encore la catégorie intermédiaire hasan. Quand l’Imâm Ahmed confie qu’il préfère le hadîth dha’îf au qiyâs, il fait indubitablement allusion au hadîth hasan.[8]

 

E-Dhâhabî lui-même, que l’adversaire se plait à utiliser en sa faveur, donne plus de détails sur ce point en établissant que les compilateurs se réfèrent à bon nombre de rapporteurs qui furent pourtant rangés sous l’étiquette : « laïsa bi el qawî. » Pour appuyer ses propos, il prend l’exemple de l’Imâm Nasâî dont le recueil renferme ce genre de rapporteurs, étant donné que ce n’est pas le genre de critique qui discrédite entièrement une personne.[9] Un peu plus loin, il déchiffre les intentions d’abû Hâtim quand ce dernier utilise cette expression. Il veut dire par là que le rapporteur en question n’a pas atteint le plus haut degré de perfection, de précision, et donc de crédibilité.[10]

 

Plus tard, le Hâfizh ibn Hajar entérinera la thèse de Dhâhabî, en s’appuyant également sur des exemples de Nasâî. Quand il dit : « laïsa bi dhâk el qawî. » ; il entend par là qu’il n’est pas un hâfizh.[11]

 

Dans sa réfutation au sinistre Kawtharî, el Mu’allimî, l’un des plus grands spécialistes contemporains, a des paroles qui vont dans ce sens.[12] Plus récemment, el Albânî qui n’est plus à présenter, donne des leçons de traduction à nos traducteurs zélés. Il explique en effet que les experts font la distinction entre « laïsa bi el qawî. » et « laïsa bi qawî. »[13] Nous avons vu que la première signifie : « Il n’est pas ce rapporteur qui est fort. » ou : « Il n’est pas ce fort rapporteur. » Alors que, nuance, la seconde veut dire plutôt : « ce rapporteur n’est pas fort » Hé oui, tout est dans le « el » ! Si l’adversaire savait à qui ce grand réformateur donnait cette leçon, il en rougirait ! Enfin, c’est tout le mal que nous lui souhaitons…

 

Il faut donc distinguer entre ne pas être fort dans l’absolu et ne pas être très fort, c’est pourtant simple.[14]

 

Un indice :

 

‘Abd Allah le fils de l’Imâm Ahmed nous a rendu un service incroyable en demandant à son père, juste après avoir entendu sa tendance : « laïsa bi el qawî. 

-          Est-il faible ?

-          laïsa bi dhâk. » En voulant dire, comme nous l’avons vu avec les paroles d’ibn Taïmiya, qu’il n’est pas d’une grande crédibilité.

 

En outre, ce même ‘Abd Allah, décidément, rapporte dans un autre recueil les paroles de son père : « Hishâm ibn Hujaïr est un mecquois, faible en hadîth. » Puis, en guise d’explication, il ramène l’avis d’ibn Shubruma : « Il n’y a personne comme lui à La Mecque. »[15] En gardant à l’esprit la règle avancée par ibn Taïmiya, toute ambiguïté se dissipe grâce à Dieu !

 

À suivre…

 

 

 

 

[1]Ta’zhîm qadr e-salât (n° 569) ; Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans silsilat el ahâdith e-sahîha (6/114).

 

[2]Celle-ci est rapportée par Sa’îd ibn Mansûr dans son recueil e-sunan (4/1482/749-…), Ahmed dans el îmân(4/160/1419), ibn Batta dans el ibâna (2/736/1010), Mohammed ibn Nasr el Marwazî dans Ta’zhîm qadr e-salât(n° 569), ibn Abî Hâtim dans son tafsîr (4/1143/6434), ibn ‘Abd el Barr dans e-Tamhîd (4/237), el Hâkim dansel mustadrak (2/313), el Baïhaqî (8/20), Sufiân ibn ‘Uyaïna, selon Hishâm ibn Hujaïr, selon Tâwûs, selon ibn ‘Abbâs. Une autre version dit : « Il s’agit de la mécréance sans n’être de la mécréance, de l’injustice sans n’être de l’injustice, et de la perversité sans n’être de la perversité. » Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans silsilat el ahâdith e-sahîha (6/114).

 

[3]El mustadrak (2/313). Il précise qu’elle n’est pas rapportée dans les recueils d’el Bukhârî et Muslim.

 

[4]Tafsîr ibn Kathîr (6/163).

 

[5]Autre traduction possible : « Personne à La Mecque n’est aussi fort que lui ou n’a son niveau. »

 

[6]Voir pour tous ces avis : el jarh wa e-ta’dîl (9/53-54), târîkh e-thiqât d’el ‘Ijlî (457/1729), e-thiqât d’ibn Shâhîn (250/1532), tabaqât ibn Sa’d (5/484), e-thiqât d’ibn Hibbân (7/567), tahdhîb el kamâl (30/179-181), el kâshif(2/335/5958), tahdhîb e-tahdhîb (11/33), e-taqrîb (2/317).

 

[7]Non : « Il n’est pas fort », comme se plaisent à le traduire certains !

 

[8]Voir : el fatâwa el kubrâ (3/243).

 

[9] El muqaddima el mûqizha (p. 319).

 

[10] Idem. (p. 322).

 

[11] Hadî e-sârî (p. 385-386).

 

[12]E-tankîr (1/240).

 

[13]E-nasîhâ (p. 183).

 

[14]Idem. (p. 254).

 

[15]El ‘ilal (1/130).

L’ANNALE D’IBN ‘ABBÂS (رضي الله عنه)

(1/3)

L’ANNALE D’IBN ‘ABBÂS (رضي الله عنه)

(2/3)

Voir : qurrat el ‘uyûn de Salîm el Hilâlî

 

B- L’avis de Yahyâ ibn Ma’în

 

Alors certes, ‘Abd Allah le fils de l’Imâm Ahmed, interrogea l’ami de son père Yahyâ ibn Ma’în sur Hishâm ibn Hujaïr. Sa réponse fut qu’il était très faible. Or, il ne convient pas de présenter les choses de cette façon, si on s’en tient à l’intégrité du dialogue qui eut lieu entre les deux hommes. Voici quelle fut la question suivante : « Est-ce que tu préfères Hishâm ibn Hujaïr à ‘Amr ibn Muslim ? 

- oui ! »

 

Cet indice, qui est de taille, est malheureusement oublié par l’adversaire. ‘Amr ibn Muslim el Janadî est, en effet, un rapporteur controversé. Selon la version d’e-Dawrî et du fils de l’Imâm, Yahyâ le considère faible. Cependant, si on revient à celle d’ibn Junaïd, nous verrons qu’il relativise son discours en disant : « lâ bas bihi. » Qu’on pourrait traduire par : « Il n’est pas mauvais. » Or, l’auteur du taqrîb le met sur le même pied d’égalité qu’Hishâm. Qu’on en juge : « Il est honnête, mais il peut se tromper. » Ainsi, selon le propre témoignage d’ibn Ma’în, Hishâm est plus crédible que le rapporteur qu’il jugea en ces termes : « lâ bas bihi. » Conclusion, il n’est pas si faible que cela ! Quand bien même il considérerait qu’il serait vraiment faible, il ne faut pas oublier que dans une autre version, celle d’Ishâq ibn Mansûr, ses paroles sont toutes autres. Elles se résument à : « Sâlih » ; ce qui veut dire qu’il est acceptable. En d’autres termes, sa critique est ici positive, si l’on s’en tient aux conventions de Dhâhabî que l’adversaire se plait à utiliser en sa faveur, même si elle n’atteint pas les plus hauts degrés de crédibilité.[1] Que faire alors dans pareil cas ! Il faut, pour les départager, revenir aux avis des autres spécialistes, et c’est ce que nous avons fait !

 

Remarque :

 

Une chaine narrative jugée « bonne » est naturellement relativement « faible » ; nous devons donc distinguer entre une chaine relativement faible et une chaine entièrement faible.[2] Tout rapporteur crédible qui a des faiblesses, aussi infimes soient-elles, peut être considéré comme relativement « faible ». Les spécialistes le savent très bien. C’est valable également pour certains rapporteurs de deux recueils les plus authentiques de la planète, qui, malgré qu’ils soient relativement « faibles », ont été pris en considération. Sauf que leur hadîth n’a pas le même degré d’authenticité qu’un hadîth« authentique », puisqu’il est tout simplement « bon ».[3]

Concernant Hishâm ibn Hujaïr, si certains spécialistes l’ont rendu faible, d’autres l’ont rendu crédible.[4] Ibn Hajar el ‘Asqalânî nous fait une synthèse de leurs opinions en coupant la poire en deux : « Il est honnête, mais il peut se tromper. » Son hadîth n’est donc pas « authentique », mais « bon ».

 

Nous penchons d’autant plus vers l’opinion d’ibn Hajar que la critique négative d’ibn Ma’în n’est pas détaillée, et comme le veut la règle, on doit faire passer avant la critique positive détaillée. Même remarque pour Yahyâ el Qattân, qui donne la sentence : « Tourne le dos à son hadîth. » Aussi érudit, soit-il, il ne nous explique pas pourquoi, et, surtout, il ne convient pas de balayer d’un revers de la main et sous aucune forme de procès, les avis des autres savants. Sans compter qu’el Qattân est à classer dans la catégorie des « durs ». Dans le pire des cas, nous disons qu’il y a divergence sur son statut, sans pour autant…

 

Il est vrai que la critique négative d’Ahmed, et même celle d’ibn Hajar est détaillée. Cependant, elle ne dit pas plus que sa mémoire est faible, dans le sens où il n’atteint pas le plus haut degré d’aptitude et de maitrise. C'est pourquoi nous disons qu’il est hasan.

 

Pour preuve, ibn Abî Hâtim établit que nous pouvons retranscrire le hadîth des rapporteurs qui ont eu droit à des appréciations du genre : « honnête », « pas mauvais », etc. Ils méritent certes une enquête minutieuse avant d’être acceptés, et certes, ils arrivent au second, voire au troisième niveau dans la hiérarchie des rapporteurs, mais cela n’empêche pas que leur hadîth soit bon, ou tout au moins, qu’il mérite d’être pris en considération.[5]

 

C- L’avis de Sufiân ibn ‘Uaïyna

 

Sufiân ibn ‘Uaïyna ne prenait de lui qu’en dernière instance, soit dans la situation où il ne trouvait rien chez les autres rapporteurs. Cela signifie-t-il qu’il le considérait faible ? La question qui se pose d’elle-même : pourquoi alors Sufiân e-Thawrî prit-il la peine de prendre directement de lui, sans attendre que ses cartouches ne soient épuisées ? L’autre question est : est-ce qu’el Bukhârî et Muslim avaient fait leur ce principe ? La réponse viendra dans quelques lignes, in shâ Allah ! Quoi qu’il en soit, ce n’est pas parce qu’on prend une narration en dernière instance que son auteur est forcément faible !

 

D- L’avis des autres savants

 

On peut toujours contester qu’il n’est pas permis en temps normal, contrairement aux grandes références anciennes, de s’en remettre à l’avis de certains spécialistes jugés trop « souples », à l’image d’el ‘Ijlî, ibn Sa’d, ibn Hibbân, mais aussi e-Sâjî et ibn Shâhîn. Alors que dire quand nous sommes confrontés à un avis opposé ?

 

Nous disons tout d’abord en réponse qu’e-Sâjî n’est pas à ranger du côté des « souples », sinon ce serait commettre une grande injustice envers lui. Demandez plutôt à ibn Abî Hâtim et à Dhahabî ce qu’ils pensent de lui.[6] Nous disons également que cette règle n’est pas toujours vraie. Sinon, il faudrait expliquer pourquoi, des grands spécialistes plus récents, comme Dhahabî et ibn Hajar, reviennent aux appréciations positives (tawthîq) qu’ibn Hibbân est le seul à avoir.[7] Que dire alors quand el ‘Ijlî, ibn Sa’d, e-Sâjî et ibn Shâhîn associent leur voix à la sienne ?

 

En outre, les appréciations positives d’ibn Hibbân, d’el ‘Ijlî, et d’ibn Shâhîn sont tout à fait acceptables quand elles reçoivent le tampon des grands spécialistes, notamment de Dhahabî et d’ibnHajar. Or, nous avons vu que c’est effectivement le cas pour Hishâm ibn Hujaïr, wa hal min muddakir !

 

E- Qu’en est-il pour el Bukhârî et Muslim ?

 

L’adversaire avance que l’Imâm el Bukhârî n’utilise jamais les hadîth d’Hishâm ibn Hujaïr dans son recueil e-sahîh, si ce n’est qu’une seule fois ; et encore c’était uniquement pour appuyer et renforcer d’autres hadîth. Même chose pour l’Imam Muslim.

 

En réponse, nous disons que les grands biographes (Dhahabî, ibn Hajar, el Mizzî) n’ont jamais amené cette restriction. Ils se contentent de dire que les deux Imams rapportent ces hadîth dans leurs recueils. En conclusion à la biographie d’Hishâm, el Mizzi est clair sur la chose : « El Bukhârî, Muslim, et Nasâî ont rapporté son hadîth. »[8] Constat qui sera repris par ses pairs. On retrouve même dans les deux grands recueils des passages en plus dans les versions d’Hishâm que l’on ne retrouve pas dans les hadîth-témoins, censés pourtant les appuyer. Alors, justement :

 

À suivre…

 

Par : Karim Zentici

 


 

[1]Voir : El mughnî (1/4), El muqaddima el mûqizha (p. 318-319), et mîzân el i’tidâl (1/403).

 

[2]E-nasîhâ (p. 92).

 

[3]Idem. (p. 126).

 

[4]Abû Dâwûd aurait dit sur lui : « dhuriba el hadd bi Mekka » ; déjà, il faut prouver qu’Abû Dâwûd vise une critique négative, et, ensuite, et c’est beaucoup plus dur, qu’il est bien l’auteur de ces paroles.

 

[5]Voir : el jarh wa e-ta’dîl (2/37).

 

[6]Voir : el jarh wa e-ta’dîl (3/601), tadhkira el huffâzh (2/709-10), et siar a’lâm e-nubalâ (14/199).

 

[7]E-nasîhâ (p. 71).

 

[8]Tahdhîb el kamâl (30/181)

L’ANNALE D’IBN ‘ABBÂS (رضي الله عنه)

(3/3)

Voir : qurrat el ‘uyûn de Salîm el Hilâlî

 

Les hadîth-témoins

 

Si l’étude précédente ne convainc pas que le hadîth d’ibn ‘Abbâs est hasan, alors voici un autre indice qui coupera court à toute suspicion à son sujet. Le malheureux Hishâm ibn Hujaïr n’est pas le seul à rapporter cette annale. Il existe en effet un hadîth-témoin venant la conforter. Cette fois-ci, son rapporteur est insoupçonnable. Il s’agit de ‘Abd Allah ibn Tâwûs qui rapporte, selon son père une annale dont voici les termes : « C’est de la mécréance, mais qui ne consiste pas à mécroire en Allah, et au Jour du jugement dernier. »[1]

 

La chaine narrative de cette version est authentique ; ses rapporteurs sont crédibles et font partie de la panoplie de Bukhârî et Muslim. Or, contre toute attente, Sufiân e-Thawrî l’a bien entendu de ‘Abd Allah ibn Tâwûs, comme en témoignent certaines chaines narratives de sahîh Muslim. La seule chose qui peut porter à confusion, c’est qu’une fois e-Thawrî la rapporte directement de ‘Abd Allah ibn Tâwûs, et une fois il passe par Ma’mar. Mais, en réalité cela ne pose aucun problème, étant donné que ce sont deux chaines narratives différentes ; l’une ne s’opposant pas à l’autre. C’est aussi simple que cela.

 

Nous avons également : selon Waqî’, selon Abû Usâma, tous deux selon e-Thawrî, selon Ma’mar ibn Râshid, selon ‘Abd Allah ibn Tâwûs : « C’est de la mécréance, mais qui ne consiste pas à mécroire en Allah, Ses anges, Ses Livres et Ses messagers. »[2]

 

La chaine narrative de cette version est authentique.[3]

 

Nous avons également : d’après ‘Abd e-Razzâq dans son tafsîr (1/1/191), selon Ma’mar, selon ‘Abd Allah ibn Tâwûs : « C’est de la mécréance » ; ibn Tâwûs ajoute : « mais qui ne consiste pas à mécroire en Allah, Ses anges, Ses Livres et Ses messagers. »[4]

 

Ce même ‘Abd e-Razzâq rapporte cette annale selon son Sheïkh Sufiân e-Thawrî, selon quelqu’un, selon Tâwûs, selon ibn ‘Abbâs disant : « C’est de la mécréance qui ne fait pas sortir de la religion. »[5] Ce quelqu’un en question, c’est ‘Abd Allah ibn Tâwûs, comme nous le confirment toutes les autres versions de Sufiân e-Thawrî.

La seconde version passe par la voie d’Alî ibn Abî Talha selon ibn ‘Abbâs :

 

Il existe une autre version qui vient conforter celle de Tâwûs. Celle-ci vient d’Alî ibn Abî Talha, et dont voici les termes : « En reniant ce qu’Allah a révélé, on devient mécréant, et en le reconnaissant, mais sans l’appliquer, on devient un injuste et un pervers. »[6]

 

Sa chaine narrative est bonne ; ses rapporteurs sont crédibles à l’exception d’Abd Allah ibn Sâlih et d’Alî ibn Abî Talha qui ne sont pas exempts de toute critique, mais qui, malgré tout, gardent la confiance des savants.

 

Le grand expert ibn Hajar fait remarquer que la chaine est interrompue (inqitâ’) entre Alî ibn AbîTalha et ibn ‘Abbâs, ou, en d’autres termes, qu’il lui manque un maillon, étant donné que le premier n’a jamais pu entendre du second.[7] Ailleurs, il résout le problème en soulignant qu’Alî était sadûq(honnête), mais, bien qu’il n’ait jamais rencontré ce noble Compagnon, il prenait ses enseignements par l’intermédiaire de ses élèves, qui, eux, étaient crédibles. El Bukhârî et ibn Abî Hâtim s’en remettaient à ses « feuillets », sans aucune crainte.[8]

 

E-Dhahabî va plus loin en donnant le nom de ce fameux intermédiaire qu’ibn Abî Talha ne prenait pas la peine de mentionner. Il s’agit en effet de Mujâhid.[9] Ailleurs, il ne cache pas sa joie d’avoir une exégèse aussi fructueuse entre les mains. Abû Ja’far e-Nuhhâz, dévoile, pour sa part, un autre nom, qui est celui de ‘Ikrima.[10] Avec Suyûtî, la liste s’allonge en la personne de Sa’îd ibn Jubaïr.[11]

 

L’auteur de fath el Bârî se charge également de résoudre l’énigme « Abd Allah ibn Sâlih », l’un desSheïkh d’el Bukhârî, personnage plus que controversé. Son enquête l’amène à distinguer entre deux périodes de sa vie : celle où sa mémoire était bonne, et l’autre, à la fin, où elle devint défaillante. Ainsi, tous ses dires que rapportent les spécialistes les plus aguerris, comme ibn Ma’în, el Bukhârî, Abû Zur’a, et Abû Hatim, on peut les prendre les yeux fermés. Cependant, nous ne pouvons pas en dire autant pour les autres paroles que lui imputent le reste des savants.[12]

 

Le cas échéant, Abû Hatim fut l’un des héros qui sauvèrent l’œuvre d’Abd Allah ibn Sâlih, et qu’éternisa son fils dans son fameux tafsîr.

 

Quoi qu’il en soit, en supposant, par condescendance, que cette version soit effectivement suspecte, il est toujours possible de la repêcher grâce à des hadîth-témoins venant la consolider ; ce qui est le cas ici, que Dieu soit loué ! C’est d’ailleurs, la voie que le lion du ShâmSheïkh el Albânî a décidé d’emprunter.[13]

 

L’annale de ‘Atâ ibn Abî Rabâh

 

Selon Sufiân e-Thawrî, selon ibn Juraïj, selon ‘Atâ : « Il s’agit de la mécréance sans n’être de la mécréance, de l’injustice sans n’être de l’injustice, et de la perversité sans n’être de la perversité. »[14]

 

Sa chaine narrative est authentique ; ses rapporteurs sont crédibles. Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans silsilat el ahâdith e-sahîha (6/114).

 

Ibn Juraïj est connu pour faire du tadlîs (en attribuant notamment à des autorités des paroles qu’elles n’ont pas dites), en dépit qu’il soit une grande sommité. Cependant, selon ses propres aveux, ce n’est pas le cas avec ‘Atâ de qui il a vraiment entendu le hadîth.[15] Sheïkh el Albânî le confirme.[16]

 

L’annale de Tâwûs el yamânî

 

Selon Waqî’, selon Sufiân e-Thawrî, selon Sa’îd el Makkî, selon Tâwûs : « … mais qui ne consiste pas à mécroire en Allah, Ses anges, Ses Livres et Ses messagers. » [17] Selon une version : « C’est de la mécréance qui ne fait pas sortir de la religion. »[18]

 

Sa chaine narrative est authentique ; ses rapporteurs sont crédibles. Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans silsilat el ahâdith e-sahîha (6/114). 

 

Il y a deux hypothèses sur l’identité de Sa’îd el Makkî : il s’agit soit d’ibn Hassân el Qurashî el Makzûmî soit d’ibn Ziyâd e-Shaïbânî ; tous deux reconnus pour être des élèves de Tâwûs. Il y a plus de probabilité pour que ce soit le premier, qui, comme le souligne sa biographie, est l’une des références directes d’e-Thawrî, contrairement à celle du second, wa Allah a’lam !

 

Ibn Hassân el Makzûmî est crédible, si l’on se réfère aux témoignages de Nasâî, Abû Dâwûd, ibn Ma’în, Ya’qûb ibn Sufiân, et ibn Hibbân.

 

Quant à ibn Ziyâd e-Shaïbânî, il doit sa crédibilité aux appréciations d’ibn Ma’în, ibn Hibbân, el ‘Ijlî, en sachant qu’il a transmis ses hadîth a un nombre élevé de rapporteurs.

 

Wa Allah a’lam !

 

 

Par : Karim Zentici

 

 


 

[1]Rapporté par e-Thawrî dans son tafsîr (101/241), et avec la même voie, e-Tahâwî dans mushkil el âthâr(2/317).

 

[2] Rapportée par Ahmed dans el îmân (4/158-159/1414), el Faryâbî dans son tafsîr comme le mentionnee-durar el manthûr (3/87), et avec la même voie, e-Tahâwî dans mushkil el âthâr (2/317), ibn Batta dans el ibâna (2/734/1005), Mohammed ibn Nasr el Marwazî dans Ta’zhîm qadr e-salât (n° 572), ibn Jarîr e-Tabarî dans jâmi’ el bayân (6/166).

 

[3]Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans sa recension à el îmân d’ibn Taïmiya (p. 307).

 

[4] Rapportée par Ahmed dans el îmân (4/160/1420), ibn Batta dans el ibâna (2/736/1009), Mohammed ibn Nasr el Marwazî dans Ta’zhîm qadr e-salât (n° 570), ibn Abî Hâtim dans son tafsîr (4/1143/6435), ibn Jarîr e-Tabarî dans jâmi’ el bayân (6/166), et el Qâdhû Waqî’ dans akhbâr el qudhât (1/41).

 

[5]Rapporté par Mohammed ibn Nasr el Marwazî dans Ta’zhîm qadr e-salât (n° 573).

 

[6] Elle est rapporté par e-Tabarî dans jâmi’ el bayân (6/166), et ibn Abî Hâtim dans son tafsîr(4/1142/6426, et 4/1146/6450), selon el Muthanna ibn Ibrâhîm el Âmilî et Abû Hâtim e-Râzî, tous deux selon ‘Abd Allah ibn Sâlih, selon Mu’âwiya ibn Sâlih, selon Alî ibn Abî Talha, selon ibn ‘Abbâs.

 

[7]Tahdhîb e-tahdhîb (7/339).

 

[8]El ‘ujâb fî bayân el asbâb (1/207) ; voir également : fath el Bârî (8/438-439).

 

[9]Mizân el i’tidâl (3/134).

 

[10] E-nâsikh wa el mansûkh (p. 75).

 

[11]El itqân (2/188).

 

[12]Hadî e-sârî (p. 414).

 

[13]Silsilat el ahâdith e-sahîha (6/114).

 

[14] Rapportée par Ahmed dans el îmân (4/159-160/1417, et 4/161/1422), et dans masâil Abî Dâwûd (p. 209),  ibn Batta dans el ibâna (2/735/1007, 2/736-737/1011), Mohammed ibn Nasr el Marwazî dansTa’zhîm qadr e-salât (n° 575), ibn Abî Hâtim dans son tafsîr (4/1149/6464), ibn Jarîr e-Tabarî dans jâmi’ el bayân (6/165, 166), et el Qâdhû Waqî’ dans akhbâr el qudhât (1/43).

 

[15]tahdhîb e-tahdhîb (6/406).

 

[16]Irwâ el ghalîl (4/244), et (5/202), sifat salât e-nabî, et silsilat el ahâdith e-sahîha (1/86).

 

[17] Rapportée par Ahmed dans el îmân (4/160/1420), ibn Batta dans el ibâna (2/736/1009), Mohammed ibn Nasr el Marwazî dans Ta’zhîm qadr e-salât (n° 570), ibn Abî Hâtim dans son tafsîr (4/1143/6435), ibn Jarîr e-Tabarî dans jâmi’ el bayân (6/166), et el Qâdhû Waqî’ dans akhbâr el qudhât (1/41).

 

[18] Rapportée par Ahmed dans el îmân (4/160/1418), et dans masâil Abî Dâwûd (p. 209),  ibn Batta dansel ibâna (2/735/1006), Mohammed ibn Nasr el Marwazî dans Ta’zhîm qadr e-salât (n° 574), ibn Jarîr e-Tabarî dans jâmi’ el bayân (6/166).

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