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Que les prières d’Allah et Son Salut soient sur Mohammed, ainsi que sur ses proches,

et tous ses Compagnons !

 

 

Voir : e-takfîr wa dhawâbituhu de Sheïkh Ibrahim e-Ruhaïlî.

 

Allah le Très-Haut a des Noms et des Attributs que recense Son Livre et que Son Prophète a divulgués à Sa communauté. Il ne convient à aucune créature d’Allah de les rejeter, une fois que les preuves sont établies contre elle (…) Après cela, il devient un mécréant, mais avant cela, il est excusable, étant donné que ce n’est pas un sujet que l’on peut percevoir par la raison, le rêve, le cœur ni par la pensée. Nous ne taxons aucun ignorant d’apostasie avant que les enseignements ne lui soient parvenus. (L’Imam e-Shâfi’î ; voir : mu’tasar el ‘Ulû d’el Albânî (p. 177).

 

Ce n’est pas parce qu’un musulman commet un acte qui relève de la mécréance (el kufr el mutlaq), que l’on doit automatiquement le taxer de mécréant (el kufr el mu’ayin). En voici la démonstration :

 

Allah révèle : [Nous n’allions châtier personne avant d’envoyer un messager].[1] [Des messagers avertisseurs et annonciateurs afin que les hommes ne puisse opposer à Allah aucun argument après leur venue].[2] [Ton Seigneur n’allait pas faire périr les cités avant d’envoyer à leur cité mère un messager qui leur récite Nos versets].[3] [Peu s’en faut qu’elle n’explose de rage ; toutes les fois qu’un groupe y est jeté, ses gardiens leur lancent : un avertisseur ne vous est-il pas venu ? • Si, répondent-il, un avertisseur nous est bien venu, mais nous l’avons démenti et avons prétendu qu’Allah n’a rien révélé].[4]

 

Ces Versets démontrent qu’Allah ne châtie jamais celui à qui Son Message n’est pas parvenu. Le châtiment ne concerne pas celui qui n’en a jamais eu connaissance. Quant à celui qui n’en reçoit qu’une partie, il ne lui sera fait grief que des enseignements qu’il conteste après en avoir eu connaissance et qui constituent désormais une preuve contre lui.[5]

 

D’après Muslim, selon Abû Huraïra (t), le Prophète (r) a déclaré : « Par Celui qui tient l’âme de Mohammed dans Sa Main ! Quiconque dans cette communauté, qu’il soit juif ou chrétien, entend parler de moi, et qui ne croit pas en mes enseignements avant de mourir, comptera parmi les gens du feu… »[6]

 

Selon ‘Abd Allah ibn Abî Awfâ : « Lorsque Mu’âdh revint du Shâm, il se prosterna devant le Prophète (r) qui protesta : « Que fais-tu Mu’âdh ?

-           Au Shâm, d’où je reviens répondit-il, j’ai surpris ses habitants en train de se prosterner devant leurs évêques et leurs patriarches. L’idée m’est alors venue de faire la même chose devant toi.

-          Ne le faites pas, répliqua-t-il. Si j’avais ordonné à quelqu’un de se prosterner devant un humain, j’aurai ordonné à la femme de le faire devant son mari… »[7]

 

Selon Khâlid ibn Dhakwân, selon e-Rabî’ bint Mu’awwadh : « Le Prophète vint chez moi le jour le notre mariage. Il entra et s’assit sur mon lit comme tu es assis en face de moi. Certaines de nos fillettes se mirent alors à jouer du duff (tambour), et chantaient en hommage à nos pères tombés à la bataille de Badr. L’une d’entre elles se mit alors à dire :« Nous avons un Prophète qui connait l’avenir » Ce dernier s’exclama aussitôt : « Évite ce genre d’expression et contente-toi de ce que tu chantais au début. »… »[8]

 

Ainsi, il est interdit de taxer un ignorant d’apostat sans auparavant avoir fourni contre lui les preuves prophétiques (el hujja e-risâliya) lui éclaircissant qu’il va à l’encontre de la loi divine. C’est valable pour n’importe quel auteur d’une parole qui en elle-même relève de la mécréance. En sachant que certaines hérésies (bid’a) sont plus graves que d’autres et que certains innovateurs ont une foi plus ancrée que d’autres. Personne n’est habilité à taxer de mécréant n’importe quel musulman qui a commis une erreur. Il ne convient pas de le faire avant de lui expliquer son erreur et d’établir toutes les preuves contre lui. Lorsque la foi est avérée chez un individu avec certitude, On ne peut la lui retirer sur une simple suspicion. La seule chose qui permet de le faire, c’est d’établir toutes les preuves contre lui et de dissiper de son esprit toute ambigüité (igâmat el el Hujja wa izâlat e-shubha).[9]

 

Les Textes divins concernant le mauvais devenir de l’homme (wa’îd) et les paroles provenant des grandes références sur les questions du takfîr (taxer quelqu’un d’apostat), dutafsîq (taxer quelqu’un de pervers), et autres, n’impliquent pas qu’ils faillent les appliquer à une personne en particulier sauf si celle-ci répond aux conditions pour le faire et si toute restriction en est exclue.[10] Sheïkh el Islam ibn Taïmiya souligne à ce sujet : « Quant à moi, - ceux qui s’assoient avec moi le savent très bien –, je compte parmi les gens qui défendent avec le plus d’acharnement de condamner une personne en particulier d’apostat, de pervers, ou de désobéissant sauf s’il devient certain que les arguments prophétiques ont été fournis à son encontre (qâmat el hudja e-risâliya) de sorte que tout individu qui les contredit soit condamnable d’être soit apostat, soit pervers, ou soit désobéissant. J’ai par ailleurs établi qu’Allah pardonne les erreurs commises par les membres de cette communauté : cela concerne aussi bien les usûl (fondements) que les furû’ (points subsidiaires). »[11]

 

Dans un autre passage, il explique : « Après s’être imprégné des enseignements du Messager (r), il devient évident qu’il n’a jamais légiféré à sa communauté d’invoquer qui que ce soit parmi les morts : Prophètes, gens pieux, etc. ni à travers la formule d’el istighâtha (appel au secours) ou autre ni à travers la formule d’el isti’âna (appel au soutient) ou autre. Il n’a pas légiféré non plus à sa communauté de se prosterner devant un mort, un vivant, ou de faire toute autre chose de ce genre. Nous savons plutôt qu’il (r) a formellement interdit ce genre de choses comme il a jugé ces pratiques relevant de l’association interdite par Allah et Son Messager. Néanmoins, en raison de l’ignorance prépondérante, du nombre restreint de personnes initiées aux traces de la Prophétie parmi les dernières générations, Nous ne pouvons pas condamner facilement les gens d’apostats pour ces raisons, avant de les avoir mis au courant des enseignements du Messager stipulant la non-pertinence de leurs pratiques. C’est pourquoi, je n’ai jamais démontré ce point à des personnes imprégnées du principe de l’Islam sans qu’elles se remettent en question en disant : c’est le principe même de la religion. Certains grands doyens expérimentés parmi nos amis disaient : c’est la plus grande chose que tu ais pu nous expliquer, car ils avaient pleine conscience que cela concernait le principe élémentaire de la religion. »[12]

 

‘Abd Allah et Ibrâhim, les deux fils de Sheïkh ‘Abd e-Latîf ibn ‘Abd e-Rahmân, et Sheïkh Sulaïmân ibn Sahmân considéré comme le « petit ibn el Qaïyim » rejoignent ibn Taïmiya sur la question. Ils affirment en effet sans ambigüité : « Le takfîr el mu’ayin (taxer d’apostasie un cas particulier) est une question connue. Quiconque prononce une parole qui relève de la mécréance, nous disons dans l’absolue qu’il est un mécréant. Cependant, si quelqu’un en particulier la dit, nous ne pouvons le condamner avant d’avoir fournit contre lui toutes les preuves qui coupent court à toute excuse une fois qu’il les a entre les mains. »[13]

   

Ainsi, il devient clair que les paroles et les actes puissent relever de l’apostasie ou de la perversité, mais cela ne veut pas dire que leur auteur soit un apostat ou un pervers sauf dans la mesure où les conditions requises pour le devenir soient rassemblées (tawaffur e-shurrût) et où toute restriction pour échapper à ce statut soit exclue (intifâ el mawâni’).[14]

 

Il convient de préciser ici qu’il faut prendre dans leur sens général les paroles des anciens taxant certaines sectes d’apostasie, comme les jahmites, les qadarites, ou encore les rafidhites. Cela ne veut pas dire qu’il faille les appliquer sur des cas particuliers et que chaque membre de ces sectes est concernée par ce statut.[15] L’imam Ahmed n’a pas kaffar(taxer d’apostasie) chaque jahmite ni tous ceux qui se revendiquent jahmites ni tous ceux qui s’accordent avec certaines de leurs idées. Il a même prié derrière les khalifes jahmites, comme el Ma-mûn qui imposait à ces sujets de suivre sa tendance sous peine de subir des punitions très sévères. Ahmed ne remettait pas en question leur appartenance à l’islam et consacrait même des invocations en leur faveur.[16]

 

Traduit par :

Karim ZENTICI       

 

 

 

 


 

[1] Le voyage nocturne ; 15 voir les tafsîr d’e-Tabarî et d’ibn Kathîr.

 

[2] Les femmes ; 165 voir les tafsîr d’el Baghawî et de Shanqîtî.

 

[3] Les récits ; 59

 

[4] La royauté ; 8-9

 

[5] Majmû’ el fatâwa d’ibn Taïmiya (12/393).

 

[6]Rapporté par Muslim (152). Pour l’explication de ce hadîth, voir : ikmâl el mu’allim (1/468), el mufhim (1/368), etsharh sahîh Muslim d’e-Nawawî (2/188).

 

[7]Rapporté par ibn Mâja (1853) et authentifié par Sheïkh el Albânî dans sa correction de ce dernier (1/312).

 

[8]Rapporté par el Bukhârî (5147) ;

 

[9] Majmû’ el fatâwa (12/393).

 

[10]Idem. (10/372).

 

[11]Idem. (229/3). Il a expliqué ailleurs : « Si nous citons sans restriction les textes concernant le sort de l’homme dans l’Au-delà (el wa’d wa el wa’îd) et si nous employons les termes d’apostat (takfîr) et de pervers (tafsîq), nous ne pouvons pas faire entrer une personne en particulier dans leur sens général avant d’établir à son encontre ce qu’ils impliquent de façon irréfutable. » [Voir : Majmû’ el Fatâwâ (28/500-501)].

 

[12] El Istighâtha (2/731). Sheïkh Ibrahim n’a pas utilisé ce texte qui est d’une grande valeur. Un texte que l’on retrouve chez Sheïkh ‘Abd el Muhsin el ‘Abbâd dans Sharh shurût e-salât.

 

[13] E-durar e-sunniya (8/244).

 

[14] El Qawâ’id el Muthla fi Sifât Allah wa Asmâihi de Sheïkh el ‘Uthaïmîn (p. 92). Voir également sur le sujet : el fisald’ibn Hazm (3/302), et sharh el ‘aqîda e-Tahawiya d’ibn Abî el ‘Izz (p. 335-336).

 

[15]Voir : el istiqâma (1/164) et Majmû’ el fatâwa (7/619) tout deux d’ibn Taïmiya. À ses yeux, lorsque les savants anciens considèrent apostat (kaffar) l’auteur de la parole : « le Coran est incréé », cela ne veut pas dire que tous ceux qui la prononcent sont des kuffars (mécréants).

 

[16] Majmû’ el fatâwa (7/507-508).​​​​​​​

LES WAHHABITES TAXENT-ILS DE MÉCRÉANTS LES IGNORANTS MUSULMANS SANS FAIRE DE DÉTAIL ? 

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LES WAHHABITES TAXENT-ILS DE MÉCRÉANTS LES IGNORANTS MUSULMANS SANS FAIRE DE DÉTAIL ? 

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Voir : e-takfîr wa dhawâbituhu de Sheïkh Ibrahim e-Ruhaïlî.

 

Les conditions à remplir et les restrictions à exclure avant de taxer d’apostasie un cas particulier :

1-      Ce cas particulier doit être pubère et sain d’esprit.

2-      Il doit avoir commis la mécréance en toute liberté (ce qui exclut la contrainte) et en pleine conscience (ce qui exclut une joie ou une colère extrême faisant perdre l’esprit comme l’histoire de l’homme qui, ayant retrouvé sa monture dans le désert, s’écria de joie : « Ô Allah ! Tu es mon serviteur et je suis Ton Seigneur. »[1]

3-      Il faut que les preuves soient établies contre lui, de sorte que s’il ne s’y soumet pas il devient inexcusable, comme nous l’avons vu précédemment.[2]

4-      Sa parole ou son acte ne doit pas être motivé par une mauvaise interprétation.

 

Or, les savants ont des avis différents sur la forme que doit prendre l’iqâmat el hujja (établir les preuves contre un cas particulier).

Pour les uns : à l’exemple d’ibn el ‘Arabî,[3] ibn Qudâma,[4] et ibn Taïmiya, il est nécessaire pour que la preuve soit effective que la personne contre qui elle est appliquée la comprenne.

Pour les autres : ce n’est pas une condition. À leurs yeux, la présence de la preuve suffit en elle-même indépendamment du fait que les gens l’aient comprise ou non. Cette tendance est attribuée à certains petits-fils de Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb, comme Ishâq ibn ‘Abd e-Rahmân ibn Hasan Âl e-Sheïkh, qui prétend reprendre l’opinion de certains savants de la « da’wa najdite » (aimmat e-da’wa).[5] Les partisans de cette tendance l’affilent également au fondateur de cette prédication, qui soit dit en passant ne fait que véhiculer les enseignements des anciens.[6]

Selon ces derniers, peu importe que ceux qui entendent le Coran en aient compris le sens ou non. Les païens, selon certains passages du Livre sacré des musulmans, ne comprennent pas le message qui leur est adressé ; il ne l’entendent pas et ne l’écoute pas. Allah révèle par exemple : [Penses-tu que la plupart entendent ou comprennent ; ils sont plutôt comme du bétail ou encore plus égarés].[7]

 

L’opinion la plus vraisemblable du reste, est la première, car il n’est pas possible d’établir la preuve d’Allah contre quelqu’un qui ne l’a pas comprise. Nous disons qu’il ne la comprend pas dans le sens où il est incapable de la comprendre soit par manque d’intelligence, soit pour être étranger à la langue à laquelle on s’adresse à lui, soit pour s’être imprégné à l’esprit certains arguments ambigus, bien qu’au même moment, il recherche la vérité. Il ne s’agit pas de se détourner des textes par entêtement ou de ne pas rechercher la vérité par négligence. Dans ces deux cas effectivement, aucune excuse n’est valable.

 

Les arguments en faveur de la première opinion :

 

1- Allah révèle : [Allah n’impose à personne des choses au-dessus de sa capacité ; elle a pour elle ses bonnes œuvres, et contre elle ses mauvaises œuvres. Seigneur, ne nous tient pas rigueur de nos erreurs et de nos oublis].[8] Un hadîth exprime que le Seigneur a répondu à cette invocation.[9]

 

2- [Et Dawûd et Sulaïmân, lorsqu’ils eurent à juger au sujet d’un champ que les moutons du voisin avaient saccagé la nuit. Nous étions témoin de leur sentence • Nous la fîmes comprendre à Sulaïmân bien qu’à tous deux, Nous offrîmes le bon jugement et le savoir].[10] Hasan el Basrî explique que le bon jugement fut accordé à Salomon dans cette affaire, bien qu’aucun grief ne fût fait à son père.[11]

 

3- Selon el Aswad ibn Sarî’, le Prophète (r) a dit : « Quatre catégories d’individus le Jour de la Résurrection : le sourd, le simple d’esprit, le vieillard décrépit, et celui qui est décidé pendant la période de la fatra (intervalle entre deux missions prophétiques) ; le sourd dira : « Seigneur, quand l’Islam est venu, je n’entendais rien » ; le fou dira : « Seigneur, quand l’Islam est venu, les enfants me jetaient des crottins d’animaux » ; le vieillard décrépit dira : « Seigneur, quand l’Islam est venu, je n’avais plus ma raison » ; et celui qui est décidé pendant la période de la fatra dira : « Seigneur, aucun de Tes messagers ne m’est venu ». Il prendra alors leur engagement de Lui obéir. Il leur sera ensuite demandé de se jeter au feu. Par Celui qui détient Mon âme dans Sa Main ! S’ils se jettent au feu, il sera pour eux frais et paisible. »[12]

 

4- Il y a deux obstacles qui empêchent de bien comprendre le message. Soit la personne ne le comprend pas du tout, soit elle le comprend mal. Les textes prennent en considération ces deux cas :

Concernant le premier cas : il y a le hadîth de ‘Âisha disant : « La plume n’inscrit pas dans trois cas : celui qui dort jusqu’à son réveil, l’enfant jusqu’à sa puberté, et le fou jusqu’à ce qu’il retrouve sa raison. »[13]

 

Concernant le deuxième cas : ‘Adî ibn Hâtim a mal interprété le Verset disant : [jusqu'à ce que vous distinguiez le fil blanc du fil noir].[14] Ce dernier nous fait la confidence qu’il mit la nuit sous son oreiller deux cordes : une blanche et une noire. Lorsqu’il essaya de vérifier, il ne constata rien. Au matin, il fit part de son expérience au Prophète, qui lui répondit aussitôt : « Le Verset parle de la noirceur de la nuit et de la blancheur du jour. »[15] Dans ce registre, nous avons l’histoire où le Prophète (r) ordonna de ne pas prier le ‘asr avant d’arriver chez les banû Quraïdha. Les Compagnons se divisèrent pourtant en deux groupes ; les uns prièrent en route de peur de ne pas arriver avant le maghrab et les autres prièrent sur place. À la suite de cet événement, le Prophète (r) ne réprimanda personne bien que forcément, l’un des deux groupes avait tort.[16]

 

Ces arguments sont d’autant plus solides que la religion musulmane à pour vocation d’enlever toute gêne à ses adeptes, comme le révèle le v. 78 de la s. le pèlerinage.

 

Quant au Verset : [penses-tu que la plupart entendent ou comprennent ; ils sont plutôt comme du bétail ou encore plus égarés].[17] Il ne signifie pas, qu’ayant perdu l’ouïe et la raison, ils sont incapables de comprendre le discours qu’ils reçoivent. Il veut cependant dire que ces deux sens leur sont inutiles, puisqu’ils les utilisent à mauvais escient.[18] La preuve, c’est qu’un autre passage du Coran nous apprend qu’effectivement, ils ne leur servent à rien : [Nous avons jeté bon nombre d’hommes et de djinns en Enfer ; ils ont des cœurs avec lesquels ils ne comprennent pas, des yeux avec lesquels ils ne voient pas, des oreilles avec lesquelles ils n’entendent pas. Ceux-là sont comme du bétail ou pire encore, ceux-là sont les insouciants].[19]

 

Ainsi, ils ne mettent pas leur sens au service de la vérité. En cela, ils sont comparables à ceux qui en sont dépourvus.[20] C’est pourquoi, Allah qualifie les hypocrites de : [sourds, muets, et aveugles, ils ne peuvent revenir].[21] Un autre Verset explique en quoi, ils sont sourds, aveugles, et muets, en disant : [Nous leur avons donné l’ouïe, la vue, et un cœur, mais leur ouïe, leur vue, et leur cœur ne leur ont servit à rien, puisqu’ils reniaient les Versets d’Allah].[22] Souvent, Allah rend la pareille aux mécréants, à travers notamment les Versets :[Nous avons enveloppé leur cœur d’un voile pour leur empêcher de comprendre et Nous leur avons bouché les oreilles].[23] Ils disaient auparavant : [N’écoutez pas ce Coran (cette lecture) et faites diversion, ainsi aurez-vous le dessus sur lui].[24] C’est alors que : [Allah scella leur cœur et leurs oreilles et Il mit un voile sur leurs yeux].[25] [Lorsque tu lis le Coran, nous mettons un voile entre toi et ceux qui ne croient pas à l’au-delà].[26] [Vois-tu celui qui prend ses passions pour divinité et qu’Allah a égaré en toute connaissance]. [27] [Ceux-là, Allah les a maudits et les a rendus sourds et aveugles].[28] [Ils ne pouvaient voir ni entendre].[29]

 

Si Allah empêche les mécréants d’avoir accès au message, à quoi bon alors leur demander des comptes le jour du Jugement dernier ? En fait, ils cultivent les fruits de leurs actes, [Allah a plutôt mis un sceau dans leur cœur en raison de leur mécréance],[30]  [Leur cœur est malade, mais Allah l’a rendu encore plus malade],[31][et pour avoir dit : « nos cœurs sont enveloppés. » Allah les a plutôt scellés en raison de leur mécréance ; ainsi, ils ne croient que très peu].[32] [Nous retournons leur cœur et leur regard comme ils n’y avaient pas cru la première fois, et nous les laissons sombrer dans leur rébellion].[33][Lorsqu’ils s’égarèrent, Allah égara leur cœur ; certes, Allah ne guide point les pervers].[34]

 

Ainsi, Allah les a bien pourvus des sens leur permettant d’avoir accès à la vérité, mais après l’avoir refusé, Allah les a châtiés en leur empêchant de comprendre et en les égarant d’avantage.[35] Nous retrouvons ces trois étapes dans un seul et même contexte : [Un Livre dont les Versets sont détaillés, une lecture arabe pour des gens qui savent • annonciateur et avertisseur, mais comme la plupart d’entre eux se sont détournés, ils n’entendent point].[36] Au départ, le Coran s’adresse à des hommes qui en comprennent le sens, mais comme ils se sont détournés, Allah les a châtiés en leur empêchant désormais d’entendre la vérité.

 

Traduit par :

Karim ZENTICI       

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

[1] Cette histoire est rapportée dans Muslim (2747).

 

[2] Voir également : el Mahalla (12/135) et el fisal tous les deux d’ibn Hazm (4/105), Majmû’ el Fatâwâ (12/523-524),tarîq el hijrataïn (p. 413) d’ibn el Qaïyim qui explique que deux comportements sont inexcusables en regard de la loi : el i’râdh (qui consiste à ne pas chercher la vérité par négligence) et el ‘inâd (qui consiste à s’entêter devant la vérité), et el muwâfaqât d’e-Shâtibî (3/377).

 

[3] Voir : tafsîr el qâsimî (5/1307-1308), 

 

[4] el mughnî(12/277).

 

[5] Voir : risâla hukm takfîr el mu’ayin wa el farq baïna iqâmat el hujja wa fahm el hujja (p. 9).

 

[6] Idem. (p. 13).

 

[7] El Furqân ; 44

 

[8] La vache ; 286

 

[9] Rapporté par Muslim (125).

 

[10] Les prophètes ; 78-79

 

[11] Voir : Tafsîr e-Tabarî.

 

[12] Rapporté par Ahmed dans el musnad (16301) ; bien qu’ibn el Qaïyim l’a authentifié dans Tarîq el hijrataïn (2/865), sa chaîne narrative reste suspecte, comme le fait remarquer l’auteur de la recension de Tarîq el hijrataïn (N. du T.).

 

[13] Rapporté par Ahmed (24694) et ibn Mâja (2041) ; Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans sa correction de ce dernier (1/247).

 

[14] La vache ; 187

 

[15] Rapporté par el Bukhârî (1916) et Muslim (1090).

 

[16] Le hadîth est rapporté par el Bukhârî (3119). Pour son explication, voir : Majmû’ el Fatâwâ (19/123) et (27/20).

 

[17] El Furqân ; 44

 

[18] Voir : fath el qadîr de Shawkânî.

 

[19] El A’râf ; 179

 

[20] Voir : tafsîr e-Tabarî.

 

[21]La vache ; 18

 

[22] El Ahqâf ; 26

 

[23] La caverne ; 57 Voir : Adhwâ el baïyân de Shanqîtî.

 

[24] Les versets détaillés ; 26

 

[25] La vache ; 7

 

[26] Le voyage nocturne ; 45

 

[27] L’agenouillée ; 23

 

[28] Mohammed ; 23

 

[29] Hûd ; 20

 

[30] Les femmes ; 155

 

[31] La vache ; 10

 

[32] Les femmes ; 155

 

[33] Le bétail ; 110

 

[34] Les rangs ; 5

 

[35] Voir : Adhwâ el baïyân (4/157-158).

 

[36] Les versets détaillés ; 3-4

LES WAHHABITES TAXENT-ILS DE MÉCRÉANTS LES IGNORANTS MUSULMANS SANS FAIRE DE DÉTAIL ? 

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Voir : e-takfîr wa dhawâbituhu de Sheïkh Ibrahim e-Ruhaïlî.

 

Ainsi, quelqu’un est susceptible de prononcer une parole qui relève de la mécréance, car il n’a pas en main les textes lui permettant de parvenir à la vérité ; ou bien même en sa possession, il remet en question leur sens ou leur authenticité ; ou il n’est pas en mesure de les comprendre correctement ; ou encore est-il accroché a des arguments ambigus qui font obstacle à la bonne compréhension et qui font qu’il est excusable. Allah pardonne au croyant qui qu’il soit, lorsqu’il commet une erreur malgré ses efforts à la recherche de la vérité. Il n’y a pas de différence en cela, entre les questions théoriques (usûl ndt.) ou pratiques (furû’ ndt.) ; cette tendance est celle des Compagnons et la plupart des grandes références de l’Islam.[1]

 

Allah ne tient pas rigueur de l’erreur et de l’oubli et l’état de mécréance ne peut être constaté avant l’étape d’éclaircissement ou avant d’en fournir les preuves.[2] En outre, iqâma el hujja varie en fonction des époques, des lieux et des personnes. La preuve d’Allah peut ainsi s’appliquer à certaines époques, à certains endroits et contre certaines personnes ; elle ne s’applique pas contre l’enfant, le fou, celui qui à du mal à comprendre le message et qui n’a personne sous la main pour lui expliquer (ou pour lui traduire) en termes compréhensibles. Le cas échéant, il est comme le malentendant qui, ne comprenant pas ce qu’on lui dit, compte parmi les quatre catégories qui, le Jour de la Résurrection, auront un prétexte devant Allah.[3]

 

La question qui se pose d’elle-même ici, c’est pourquoi les paroles de Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb laissent entendre que l’ignorance n’intercède pas en faveur de celui contre qui la preuve d’Allah est appliquée ? Ishâq ibn ‘Abd e-Rahmân ibn Hasan comprend des paroles de son arrière-grand-père que le Coran constitue en lui-même une preuve contre celui qui l’a entre les mains, indépendamment du fait qu’il comprenne son message ou non.[4]  Ce dernier s’inspire de trois passages du Sheïkh avant de conclure : « Voici trois passages qui démontrent que la preuve est établie par le Coran contre tous ceux qui le reçoivent et l’entendent, bien qu’ils ne le comprennent pas. »[5]

 

L’un des arguments probablement les plus éloquents de cette tendance provient des paroles mêmes du Sheikh qu’il écrivit dans l’une de ses lettres : « À nos frères, salâm ‘alaïkom wa Rahmat Allah wa Barakâtuhu ! Les paroles que vous avez citées du Sheïkh (ibn Taïmiya ndt.) disant que quiconque renie telle et telle chose après que la preuve soit établie contre lui… Et vous, vous hésitez sur ses taghût et leurs adeptes en vous demandant si la preuve est établie contre eux. C’est vraiment étonnant ! Comment pouvez-vous douter sur une chose pareille ! Je vous l’ai pourtant expliqué à maintes reprises. Celui contre qui la preuve s’applique, c’est celui qui vient de se convertir, qui habite loin des villes, ou qui se trompe sur des points subtils comme el sarf et le ‘atf (liés à la sorcellerie ndt.). Dans ces cas, ils ne sont pas mécréants avant d’avoir reçu le savoir. Quant aux fondements de la religion (el usûl) qu’Allah a expliqués de façon formelle dans Son Livre, leur preuve c’est le Coran. Quiconque reçoit le Coran reçoit la hujja (preuve).

Le problème, c’est que vous ne faites pas la différence entre établir la hujja et comprendre la hujja. La majorité des mécréants et des hypocrites parmi les musulmans ne comprennent pas la preuve d’Allah, qui, pourtant, est établie contre eux, comme le révèle le Verset : [Penses-tu que la plupart entendent ou comprennent ; ils sont plutôt comme du bétail ou encore plus égarés].[6] Établir et recevoir la hujja est une chose, en sachant qu’elle est établie contre eux, et la comprendre en est une autre. Ainsi, ils sont mécréants pour l’avoir reçue bien qu’il ne la comprenne pas. »

 

Ce texte du Sheïkh – qu’Allah lui fasse miséricorde – est l’un des arguments les plus éloquents utilisés par ceux qui défendent qu’il ne tient pas pour condition de comprendre la hujja afin qu’elle soit établie sur un cas particulier. Or, ce dernier est l’auteur d’autres paroles qui expliquent de façon formelle qu’il impose comme condition de comprendre lahujja. La lettre qui s’adresse au Sharîf nous enseigne : « Si l’on sait que nous ne taxons pas d’apostasie ceux qui adorent la stèle érigée au-dessus de la tombe de ‘Abd el Qadîr, ainsi que celle sur le tombeau d’Ahmed el Badawî et d’autres dans le genre, en raison de leur ignorance et car ils n’ont personne pour leur éclaircir, comment pouvons-nous dès lors le faire pour celui qui n’associe rien à Allah sous prétexte qu’il n’a pas émigré chez nous, dans la mesure où il n’a pas apostasié ni combattu la vérité. Gloire à Allah ! Quelle énorme calomnie ! »[7]  

  « en raison de leur ignorance et car ils n’ont personne pour leur éclaircir » ou selon certains manuscrits : « car ils n’ont personne pour leur faire comprendre » Ce passage formule explicitement qu’à ses yeux, il faut comprendre la hujjapour qu’elle soit effective. Il va sans dire que les personnes auxquelles il fait allusion vivent en terres musulmanes au sein desquelles le Coran et la Sunna sont répandus, sauf qu’elles ont besoin que la hujja leur soit expliquée de la part des savants traditionalistes.

 

Il est possible toutefois de concorder entre ses paroles en disant qu’il distingue entre une compréhension approximative du discours qui permet de pénétrer les « intentions » du Législateur dans l’ensemble et une compréhension approfondie qui relève de la compétence des savants. La première forme de compréhension est suffisante afin que la hujja, qui ne s’applique qu’à travers ce moyen, soit effective. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre ses paroles. Autrement dit, cette compréhension est nécessaire pour établir la hujja et taxer d’apostasie (kaffar) un cas particulier. La deuxième forme de compréhension n’est pas nécessaire pour établir la hujja. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre ses paroles qui, en apparence, semblent se contredire.

Certaines paroles du Sheïkh qu’il a prononcées dans le même contexte où il ne tient pas compte de la compréhension des textes pour établir la hujja contre un cas particulier, consolident notre idée. Il souligne en effet : « Si un cas particulier est taxé d’apostasie après avoir établi la hujjacontre lui, de toute évidence, cela ne signifie pas qu’il doit comprendre la Parole d’Allah et de Son Messager comme Abû Bakr e-Saddîk (t). Néanmoins, s’il la reçoit, il devient mécréant dans la mesure où aucune excuse n’intercède en sa faveur. »[8]

 

Ainsi, le Sheïkh ne demande pas de cerner toutes les subtilités du discours du Législateur à la manière d’Abû Bakr (t), mais il tient compte d’une compréhension minimum et suffisante pour saisir Sa Volonté. Ainsi, Mohammed ibn ‘Abd el Wahhâb rejoint les grands spécialistes traditionalistes qui imposent comme condition, avant de constater la mécréance chez un cas particulier, que ce dernier comprenne la preuve qui est adressée contre lui. Il est donc erroné d’attribuer auSheïkh qu’il ne tient pas compte d’une compréhension minimum des textes.

 

Cette analyse n’a pas échappé à Mohammed Rashîd Ridâ, qui souligne en annotation à majmû’ e-rasâil e-najdiya : « Cette restriction de la part du Sheïkh qui impose ici une compréhension minimum dissipe la confusion qui s’impose à l’esprit en lisant d’autres passages de ses œuvres. En s’en tenant à ces derniers passages, certains savants du Najd soutiennent que la présence du Coran est suffisante pour établir la hujja contre les hommes, quand bien même ils ne comprendraient pas son message. Cette conception illogique s’oppose au Verset disant : [Celui qui s’écarte du Messager, après avoir distingué la bonne voie].[9]  Elle ne va pas non plus dans le sens des thèses soutenues par les grands spécialistes et disant qu’il est nécessaire de faire comprendre le prêche prophétique (da’wa) avec ses arguments, avant d’établir la hujja »[10]

 

Gloire à Toi Ô Allah ! Et à Toi les louanges ! J’atteste qu’il n’y a d’autre dieu (digne d’être adoré) en dehors de Toi ! J’implore Ton pardon et me repens à Toi !

 

Traduit par :

Karim Zentici    

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

[1] Majmû’ el fatâwa d’ibn Taïmiya (23/326).

 

[2] Idem. (12/523-524).

 

[3] Tarîq el hijrataïn (p. 414).

 

[4] Voir : la risâla dont il est l’auteur : hukm takfîr el mu’ayin wa el farq baïna iqâmat el hujja wa fahm el hujja (p. 13).

 

[5] Idem. (p. 13).

 

[6] El Furqân ; 44

 

[7] Fatâwa wa masâil e-Sheïkh (p. 11) et e-Durar e-Sunniya (1/66).

 

[8] Muallafât e-Sheïkh (p. 220).

 

[9] Les femmes ; 115

 

[10] majmû’ e-rasâil e-najdiya (5/638).

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