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Au nom d’Allah le Très Miséricordieux, le Tout Miséricordieux 

 

El ibâna a-t-il été falsifié ?

 (Partie 1)

 

Voir : el ashâ’ira fî mîzân ahl e-sunna (p. 689-700) de Faïsal el Jâsim.

 

Plusieurs éléments montrent qu’el ibâna n’a pas subi les transformations qui nous permettraient de jeter le discrédit dessus ou pour le moins, la suspicion sur son authenticité ; en voici les principaux :

 

Premièrement : Les différents exemplaires existants de l’ibâna sont similaires les uns les autres au niveau de l’ordonnancement des chapitres, le choix du vocabulaire, des questions soulevées, et ne dénotent aucune contradiction sensible entre elles.

 

Deuxièmement : En comparant ces fameux exemplaires de l’ibâna qui sont répandus aujourd’hui aux passages que les savants anciens ont puisé dans ses premiers manuscrits, les « révisionnistes » se rendront compte que leur similitude est accablante.

Le Hâfizh el Baïhaqî a reproduit une section entière de l’ibâna dans son ouvrage el i’tiqâd (p. 114) qui est copie conforme avec les exemplaires imprimés. Le même constat est fait avec ibn ‘Asâkir qui a retranscrit plusieurs sections de l’ibâna dans son tabyîn kadhib el muftarî (p. 152-162). Que dire de l’hérésiographe ibn Taïmiya qui reprend maints passages de l’ouvrage d’Abû el Hasan.[1] Même chose pour son élève ibn el Qaïyim,[2] mais aussi e-Dhahabî.[3]

 

Troisièmement : Mieux, il y a une ressemblance accablante entre l’ibâna et les dernières œuvres d’Abû el Hasan, comme maqâlât el islâmiyîn et risâla ilâ ahl e-thaghr. Tous reprennent le crédo des traditionalistes avec la même similitude.

 

Or, il est faux de dire qu’un livre est falsifié sous prétexte qu’il existe quelques divergences ou nuances sur le choix de certains termes, d’une version à une autre. D’autant plus que ces divergences en question n’altèrent en rien au sens général du texte ou de la phrase et ne se contredisent nullement. Ces nuances sont pratiquement naturelles et sont propres à tous les livres qui connaissent dans leur composition plusieurs copistes et plusieurs manuscrits. Le sahîh el bukhârî lui-même n’est pas épargné par les différences relevées entre les manuscrits. Nous pouvons en dire autant pour les sunan et les masânid. Est-il vraiment nécessaire de le rappeler, mais aucun livre d’inspiration humaine n’est épargné par cette critique, c’est pourquoi on parle de l'infaibillité du Coran.

 

Nos deux auteurs contribuent à véhiculer ce jugement sur l’ibâna en disant : « Les exemplaires divergent sur l’œil d’Allah : il est parfois au singulier et parfois au duel. » Ils essaient ensuite de trancher partialement entre les deux termes. Leur choix s’est porté sur le singulier sous prétexte qu’il serait plus conforme au Coran, à la sunna et aux paroles des anciens. Or, leur argument est bien loin de la réalité, mais ce qui nous intéresse ici, c’est qu’Abû el Hasan lui-même ne leur concède pas ce choix, pour le moins aléatoire. Plusieurs raisons permettent de le dire :

 

1 – Le duel est conforme au crédo des anciens. Dans sa réfutation à el Mirrîsî, e-Dârimî établit : « Concernant l’interprétation (ta-wîl dans le sens de tafsîr : explication ndt.) des paroles du Messager d’Allah (r) : « Allah n’est pas borgne » ; il nous apprend qu’Allah est doté de la vue et qu’Il a deux Yeux, contrairement au borgne. »[4] Ibn Khuzaïma pour sa part, il est l’auteur de ces paroles : « … Le Prophète (r) montre ainsi qu’Allah a deux Yeux. Cet éclaircissement est conforme au Coran (muhkum e-tanzîl).[5]

 

2 – El Ash’arî utilise également le duel dans ses autres livres. Il dit notamment dans maqâlât el islâmiyîn, en explication à la croyance traditionaliste : « Il a deux Yeux conformément au Verset [qui vogue sous nos yeux(au duel)].[6] »[7] Sous la section : la divergence sur l’œil, le visage, la main, etc. il explique : « Les traditionnistes (ashâb el hadîth) ont dit : nous nous contentons de dire comme Allah le Tout-Puissant, ou les paroles rapportées par le Messager d’Allah (r). Nous disons donc qu’Il a un Visage sans faire de description (bi lâ kaïf), deux Mains et deux Yeux sans faire de description. »[8]

 

Il explique également sous la section : voici quelques narrations de la tendance en général des traditionnistes et des traditionalistes (ahl e-sunna) : « Il a deux Yeux sans faire de description conformément au Verset [qui vogue sous nos yeux(au duel)].[9] »[10]

 

Par ailleurs, Abû el Hasan considère qu’en reniant cet Attribut (les deux Yeux d’Allah), les mu’tazilites s’éloignent des traditionalistes. Il dit notamment en parlant de la tendance mu’tazilite : section : leur tendance sur l’œil et la Main : «Certains d’entre eux reprochent de dire qu’Allah a deux Mains et reprochent de dire qu’Il a deux Yeux. »[11] Il est évident que lui-même reconnait cet Attribut. Que nos deux auteurs n’aillent pas dire que maqâlât el islâmiyîn a également été touché par la main de l’homme !

 

3 – Les premières grandes références ash’arites reconnaissaient cet Attribut  (les deux Yeux d’Allah) au même titre que leur maître spirituel. Le plus connu et le plus représentatif d’entre eux s’incarne en la personne d’Abû Bakr ibn e-Taïb el Baqallânî, l’auteur des paroles suivantes : « Allah affirme qu’Il est doté de Noms et d’Attributs… » Après avoir énuméré certains Attributs, il poursuit : « Les deux Yeux que le Coran considère clairement comme un Attribut et que confirment les annales venant du Messager (u) communément transmises. Allah dit notamment : [et que tu sois élevé sous nos yeux].[12] »[13]

 

Ainsi, l’un des adeptes les plus illustres d’el Ash’arî reconnait les deux Yeux, et ne se contente pas d’en reconnaitre un seul.

 

4 – Cette divergence entre les termes n’est pas nouvelle. Elle existait déjà dans les anciennes versions de l’ibâna qui servit de sources pour les savants. Ibn ‘Asâkir utilise le singulier dans sa version qu’il utilise pour tabyîn kadhib el muftarî. Tandis qu’ibn Taïmiya rapporte le duel de la version qu’il utilise dans ses livres.[14] Ibn el Qaïyim rapporte également le duel.[15] Cela démontre que la différence entre les exemplaires de l’ibâna n’est pas un phénomène nouveau.

Ibn Taïmiya retranscrit même des passages de tabyîn kadhib el muftarî d’ibn ‘Asâkir qui s’inspire de l’ibâna. Il utilise également ici le duel.[16] Ibn el Qaïyim reprend également l’expression au duel en s’inspirant d’ibn ‘Asâkir.[17]

 

5- Il n’y a aucune contradiction entre le terme singulier et le duel. Le singulier est en effet utilisé pour exprimer le genre, dans le sens où Allah est doté de l’œil, pour désigner qu’Il a deux yeux, de la même façon qu’il est doté de la Main, pour désigner les deux Mains.

 

À suivre…

 

Traduit par :

Karim Zentici

 

 

 

 

 

[1] Voir : naqdh e-ta-sîs (p 63-85), majmû’ el fatâwa (3/224-225), (5/93-98, 168-178), bayân talbîs el jahmiya (1/420-422), (2/10-26, 348-349).

 

[2] Hâshiya ‘alâ tahdhîb e-sunan (13/35-36), mukhtasar e-sawâ’îq (2/169) dans lesquels il rapporte les textes qui parlent de la Main d’Allah, ijtimâ’ el juyûsh el islâmiya (182-190).

 

[3] El ‘Ulû (p. 218) et el ‘Arsh (291-303).

 

[4] E-radd ‘alâ el Mirrîsî (1/328).

 

[5] E-tawhîd bâb dhikr ithbât el ‘aïn li Allah (U) (p. 42).

 

[6] La lune ; 14

 

[7] maqâlât el islâmiyîn (1/285).

 

[8] Idem. (1/290).

 

[9] La lune ; 14

 

[10] maqâlât el islâmiyîn (1/345).

 

[11] Idem. (1/271).

 

[12] Ta-Ha ; 39

 

[13] El insâf fî bayân sifât Allah ta’âlâ (p. 24).

 

[14] Voir : majmû’ el fatâwa (5/94), el fatâwa el kubrâ (5/337), et bayân talbîs el jahmiya (1/422),

 

[15] E-sawâ’îq el mursala (1/265) et ijtimâ’ el juyûsh el islâmiya (p. 289).

 

[16] El fatâwa el kubrâ (5/337).

 

[17] Ijtimâ’ el juyûsh el islâmiya (p. 289).

EL IBÂNA A-T-IL ÉTÉ FALSIFIÉ ?    (1/2)

EL IBÂNA A-T-IL ÉTÉ FALSIFIÉ ?    (1/2)

Voir : el ashâ’ira fî mîzân ahl e-sunna (p. 689-700) de Faïsal el Jâsim.

 

Voici un autre exemple : Certains exemplaires de l’ibâna ajoutent l’expression : « loin du panthéisme et du monisme (munazzah ‘an el hulûl wa el ittihâd) » en parlant de l’istiwâ. Voici le passage en question : « Cela démontre qu’Allah le Très-Haut se particularise par Son Unicité, et est établi (mustawi) sur Son Trône [loin du panthéisme et du monisme]. » Cet ajout n’altère aucunement le sens de la phrase. Il ne fait que donner des informations supplémentaires sur la notion de l’istiwâ qu’il incombe de comprendre en sens propre. Il ne sous-entend ni qu’Allah est identifié au Trône, fusionné, ou incarné dans le Trône ni qu’Il constitue, Lui et le Trône, une substance unique. Il ne faut y voir aucune contradiction, mais il s’agit de renforcer l’idée que l’istiwâ est à prendre au sens littéral du terme.

 

Il y a falsification lorsque l’ajout ou la suppression d’un passage altère le contexte, ce qui n’est pas le cas ici.

 

Pour conforter la thèse que l’ibâna est falsifié, nos deux auteurs avancent qu’il rapporte des critiques impensables sur Abû Hanîfa. Ce dernier aurait dit que le Coran est créé.

 

Or, cette affaire sur Abû Hanîfa, indépendamment du fait qu’elle soit vraie ou fausse, n’est pas nouvelle à l’époque d’Abû el Hasan. Bien des grandes références avant lui, la rapportent. Nous avons el Bukhârî dans el tâkhîkh el kabîr(4/127), et khalq af’âl el ‘ibâd (p. 7) ; ‘Abd Allah le fils de l’Imam Ahmed dans e-sunna (1/184) ; el ‘Uqaïlî dans e-dhu’afâ (4/280) ; e-Lalakâî dans sharh usûl i’tiqâd ahl e-sunna (2/239) ; ibn el Ja’d dans son musnad (p. 66) ; el Khatîb el Baghdâdî dans tâkhîkh Baghdâd (13/388). Doit-on en conclure que tous ces livres sont falsifiés ?

 

‘Abd Allah le fils de l’Imam Ahmed consacre un chapitre entier sur l’Imam Abû Hanîfa – qu’Allah lui fasse miséricorde –. Il appose en effet en titre : Chapitre : Les paroles que mon père et d’autres Sheïkh m’ont enseignées sur Abû Hanîfa. Il énumère ensuite, de nombreuses annales sur la question.[1] Cela ne veut pas dire qu’il faut prendre cette « rumeur » pour argent comptant. Il est même certifié que l’Imam ait dit le contraire, comme en témoigne son figh el akbar, et ses autres ouvrages et certaines de ses lettres. L’Imam affirme également que le Coran est incréé dans el ‘aqîdad’ibn Sâ’id et bien d’autres livres. Là où nous voulons en venir, c’est que plusieurs traditionnistes imputent (à tort certes, bien qu’il existe une autre hypothèse que nous n’évoquerons pas ici ndt.) à l’Imam une croyance contraire à l’ « orthodoxie » sur le caractère incréé du Coran. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce qu’Abû el Hasan reprenne ces accusations dans el ibâna. Il est par contre étonnant d’en faire un indice pour discréditer son livre !

 

Le problème de nos deux auteurs, c’est qu’ils reprennent sans faire la moindre investigation, les idées d’el Kawtharî, connu pour son adhésion frénétique à l’école hanafite. Le terme frénétique n’est pas trop fort, si l’on en juge ses diatribes (critiques acerbes) lancées contre toute personne ayant, de près ou de loin, osée affichée, ne serait-ce qu’un semblant d’opposition à son Imam v…    

Personne n’échappe à sa vindicte pas même certains Compagnons et certains grands spécialistes en hadîth, mais aussi en figh, en commençant par les fondateurs des trois autres écoles… wa Allah el musta’ân !

 

Traduit par :

Karim Zentici

 

 

 

 

[1] E-sunna (1/180).

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