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Au nom d’Allah le Très Miséricordieux, le Tout Miséricordieux

 

 

Voir : el ashâ’ira fî mîzân ahl e-sunna (p. 320-324) de Faïsal el Jâsim.

 

 

Pour les ash’arites, le ta-wîl correspond à faire passer un terme de son sens propre à son sens figuré lorsque le contexte où certains éléments l’autorisent. En d’autres termes, il consiste à faire abstraction du sens propre d’un mot. Cette définition, qui fut établie par les néo-scolastiques, ne respecte pas le sens étymologique du ta-wîl ni celui qui était en vigueur chez les anciens.

 

 

Selon le dictionnaire el mukhtâr e-sihâh, le ta-wîl est la concrétisation, la réalisation, l’éclaircissement (tafsîr) d’une chose.[1] Dans lisân el ‘arab : el awwal, c’est le retour… le ta-wîl consiste donc à retourner, ramener quelque chose à, voire à répéter une chose.[2]

 

 

Nous pouvons en conclure que dans la langue arabe, il existe deux sens du terme ta-wîl.

 

 

Premièrement : il correspond à la concrétisation des paroles, en sachant qu’il y a deux formes de paroles : indicative (khabar) qui englobe la forme affirmative ou négative et impérative (talab) qui englobe les obligations et les interdictions.

 

Concernant la forme indicative : le ta-wîl a le sens de concrétisation, réalisation de l’information, comme dans le Verset : [tel est le ta-wîl du rêve que j’avais fait].[3] Autrement dit, le rêve qu’il avait fait s’est réalisé, concrétisé. Un autre Verset dit : [Est-ce qu’ils attendent son ta-wîl, mais lorsque son ta-wîl leur vient, ceux qui l’ont oublié disent],[4] c’est-à-dire est-ce qu’ils attendent que la menace et le châtiment contre lesquels Allah les avait prévenus se réalisent.

 

Concernant la forme impérative : qui correspond, rappelons-le aux obligations et aux interdictions, le ta-wîl consiste à se plier et à mettre en pratique les obligations de l’Islam ou à s’éloigner et à éviter de commettre les interdictions. Dans ce sens, nous avons les paroles de ‘Âisha disant : « Le Prophète (r) disait dans ses rukû’ et ses sujûd : gloire à toi Ô Allah ! Notre Seigneur et à Toi revient les louanges ! Ô Allah, pardonne-moi ! En mettant le Coran en pratique (yataawwal el Cor-an). » Autrement dit, il se soumettait et mettait en pratique le Verset : [Glorifie Ton Seigneur, fais-lui les louanges et implore Son Pardon].[5]

 

Deuxièmement : le ta-wîl dans le sens de tafsîr. Il s’agit d’expliquer un terme par d’autres termes en vue de l’éclaircir. Ce terme fait partie du vocabulaire des mufassirîns (exégètes du Coran), lorsqu’ils disent leta-wîl du Verset… Ibn Jarîr e-Tabarî donne pour titre à son tafsîr : jâmi’ el bayân ‘an ta-wîl Âyi el Cor-ân. L’imam Ahmed propose le titre suivant à sa réfutation aux jahmites : e-radd ‘alâ el jahmiya wa e-zanâdiqa fî mâ taawwalat-hu min el Qur-ân ‘alâ ghaïr ta-wîlihi. Même en français, le premier sens du terme « interprétation » (ta-wîl, tafsîr) est l’action d’expliquer, d’éclaircir une chose.

 

Si l’on s’en tient au premier sens du ta-wîl, il décrit, concernant les informations qu’Allah donne sur Ses Attributs et Ses Actions, leur réalité. En cela, ce ta-wîl est propre à Allah, Lui Seul connait la réalité de Son Essence et de Ses Attributs. Personne ne peut les connaitre et encore moins les décrire en détail.

C’est dans ce sens qu’il faut prendre le Verset : [Personne ne connait son ta-wîl en dehors d’Allah],[6]c’est-à-dire que personne ne connait sa réalité.

 

Si l’on s’en tient au deuxième sens du ta-wîl, il correspond à la description qu’Allah se fait de Lui-même et de Ses Hauts Attributs. Il s’agit du tafsîr qui est l’action de donner une signification (doit-on ajouter théorique par opposition à leur interprétation concrète que Seul le Seigneur est à même de connaitre ndt.) à ces termes. Il est possible d’avoir accès à cette signification grâce à la langue par laquelle Allah s’adresse aux hommes et par laquelle Il se fait connaitre à Ses créatures, en sachant qu’il ne peut y avoir de confusion avec la création étant donné que rien ne ressemble à Son Essence ni à Ses Attributs ni à Ses Actions.

 

C’est dans ce sens que de nombreux anciens décident de s’arrêter après : [et ceux qui sont versés dans la science].[7]

 

 

Ibn Jarîr explique à ce sujet : « Les spécialistes en ta-wîl ont des avis divergents sur son ta-wîl (tafsîr : explication). Est-ce que les râsikhûn (ceux qui sont versés dans la science) sont coordonnés (par la conjonction et) à Allah ou non, dans le sens où ils s’associent à Lui dans la connaissance de ces choses ambiguës (ta-wîl el mutashâbih) ; ou bien s’agit-il d’une nouvelle phrase expliquant leur réaction, lorsqu’ils disent : Nous donnons foi aux textes ambigus, et nous sommes convaincus que Seul Allah en connait le vrai sens.

 

Selon certains, Seul Allah en connait le vrai sens, Il se particularise par Son Savoir unique.

Quant aux râsikhûn, il leur est consacré une nouvelle phrase dans laquelle ils affirment qu’ils croient aux Versets ambigus et formels (muhkam), étant donné qu’ils viennent tous d’Allah… » Après avoir dressé la liste des savants qui penchent pour cette opinion, en nommant notamment ‘Âisha, ibn ‘Abbâs, ‘Urwa, Abû Nuhaïk, etc. il poursuit : « Selon d’autres, Allah en connait le ta-wîl mais aussi les râsikhûn ; ils sont donc les seuls à en pénétrer le sens. Or, malgré leur savoir étendu, et leur connaissance des Versets ambigus, cela ne les empêche pas de dire, nous y croyons, ils viennent tous de Notre Seigneur… » Il énuméra ensuite ceux qui optent pour cette opinion dont notamment ibn ‘Abbâs (apparemment selon une autre version ndt.), Mujâhid, e-Rabî’ ibn Anas, Mohammed ibn Ja’far ibn e-Zubaïr.[8]

 

Quant à la définition du ta-wîl sur laquelle s’entendent les différentes sectes négatrices des Noms et Attributs divins, nous en concluons qu’elle est nouvelle. Sans compter que les éléments qui autorisent à avoir recours au ta-wîl sont laissés à leur propre appréciation. Cette règle est donc plus qu’aléatoire, outre le fait qu’elle s’oppose au sens étymologique du mot et de son usage chez les anciens. La raison, ou plus exactement « leur raison», est le seul arbitre pour définir non seulement quand le contexte incombe de faire abstraction du sens propre, mais qui plus est, quelle nouvelle interprétation à donner aux termes qui leur posent problème. Ils ne se réfèrent ni aux preuves textuelles (Coran et hadîth confondu) ni aux annales des anciens.

 

C’est pour défendre ce genre de ta-wîl que certains négateurs consacrèrent un livre sur le sujet, à l’image d’Abû Bakr ibn Fark, l’auteur de ta-wîl mushkil el Qur-ân. C’est contre ce dernier livre que la réfutation du Qâdhî Abû Ya’lâ, l’auteur d’ibtâl e-ta-wîlât fî akhbâr e-Sifât, est destinée. Ibn Qudâma condamne tout autant ce genre de ta-wîl avec son dhamm e-ta-wîl.

 

Traduit par :

Karim Zentici

 

 

[1] El mukhtâr e-sihâh dans la rubrique alif waw lam.

[2] lisân el ‘arab dans la rubrique alif waw lam.

[3] Yûsaf ; 100

[4] El a’râf ; 53

[5] La victoire ; 3

[6] La famille d’Imrân ; 7

[7] La famille d’Imrân ; 7

[8] Voir : tafsîr e-Tabarî (3/182-183).

LE TA-WÎL

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