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LE MA’LUM MIN E-DIN BI E-DHARURA (1/2)

 

 

Louange à Allah le Seigneur de l’Univers ! Que les Prières et le Salut d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur ses proches et tous ses Compagnons !

 

Dans son livre, e-tabsîr fî ma’âlim e-dîn, ibn Jarîr e-Tabarî annonce qu’il existe deux genres d’enseignements dans la religion : mâ yasa’ el jahl bihî wa mâ la yasa’ el jahl bihî ou en d’autres termes : mâ yu’dhur bi el khata wa mâ la yu’dhur bi el khata. Autrement dit, les enseignements qu’il est concevable d’ignorer et ceux qu’il est inconcevable d’ignorer. Il explique notamment qu’il existe des questions dont la connaissance est élémentaire (ma’lûm min e-dîn bi e-Dharûra). Ibn Taïmiya souligne, comme nous allons le voir plus loin, que même sur ce dernier point, les choses sont relatives.[1] Dans son tafsîr, ibn Jarîr parle également d’iqâmat el hujja.[2]

 

La raison est-elle à même de distinguer entre le bien et le mal ?

 

Ibn Taïmiya explique : « Les créatures ne sont pas capables de savoir ce qu’Allah aime et agrée ni ce qu’Il ordonne ou interdit. Ils ne peuvent deviner les jouissances qu’Il a réservées à Ses élus ni les châtiments qu’Il a réservés à Ses ennemis. Ils n’ont aucune idée également des nobles Noms et Attributs qu’Il mérite, car la raison n’est pas en mesure de le deviner, etc. S’ils ont accès à toutes ces choses, c’est uniquement grâce à la présence des messagers qu’Allah leur a envoyés. »[3]

 

« … Pour comprendre ce principe, nous devons nous poser la question : est-ce que la Loi divine est applicable à toute personne responsable même avant qu’elle ne lui parvienne ? Il existe trois opinions notoires notamment dans la tendance d’Ahmed : l’une disant qu’elle est applicable, l’autre disant qu’elle ne l’est pas, et la dernière enfin disant que seule la loi d’origine est applicable, non celle qui l’abroge. La plus plausible toutefois est celle selon laquelle elle n’est pas tenue de récupérer tout ce qu’il n’a pas fait avant de la connaitre ; la Loi divine n’est donc pas applicable avant d’avoir été transmise, conformément aux Versets : [Ce Coran me fut révélé afin que je vous avertisse, vous et tous ceux à qui il est parvenu],[4] [Nous n’allions châtier personne avant d’envoyer un messager].[5] [Des messagers avertisseurs et annonciateurs] afin que les hommes ne puissent opposer à Allah aucun argument après leur venue].[6] Le Coran a recours à différents procédés pour démontrer ce point. Ils nous apprennent en substance qu’Allah ne châtie aucune personne avant que les enseignements prophétiques ne lui fussent transmis.

Quelqu’un peut savoir que Mohammed est le Messager d’Allah, puis croire en lui, mais sans connaitre les nombreux détails de son message. Allah ne le châtiera pas pour ceux qu’il n’a pas reçus. S’Il ne châtie pas un homme n’ayant pas la foi avant que le message ne lui parvienne, à fortiori, Il ne châtie pas celui, qui, ayant cru en Lui, n’a pas eu accès à certains de ses détails. »[7]

 

La preuve céleste varie en fonction des endroits, des époques et des personnes

 

Ibn Taïmiya explique : « … De la même manière, les mécréants qui se trouvent en terre non musulmane et qui, ayant entendu parler de la prédication du Prophète (r), surent qu’il était le Messager d’Allah, puis crurent en lui et à ses enseignements, tout en craignant Allah dans la mesure du possible. Ce fut le cas, notamment, du Najâshî, qui n’était pas en mesure d’émigrer en terre musulmane ni d’adhérer à toutes les lois de l’Islam. Sa place lui empêchait, en effet, de sortir de son royaume et d’afficher sa religion. Et cela, d’autant plus qu’il n’avait personne sous la main pour lui apprendre toutes les lois de la religion. Il était pourtant un croyant, promis au Paradis. Dans ce cas, nous avons les croyants de la famille de Pharaon, dont sa propre femme, qui se comportaient de la même façon avec leur peuple.

 

Yûsaf  (u) le véridique lui-même ne pouvait pas faire autrement avec les habitants d’Égypte qui étaient des mécréants. Il n’était pas en mesure de leur imposer les enseignements de l’Islam qu’il connaissait ; ils les avaient bien conviés à embrasser la foi, et la religion monothéiste, mais sans succès. Allah (I) relate les paroles des croyants de la famille de Pharaon : [Yûsaf vous était venu auparavant avec des preuves éclatantes, mais vous n’aviez cessé de douter de ce qu’il vous avait ramené. Lorsqu’il mourut, vous prétendirent alors qu’Allah n’enverrait aucun messager après lui].[8]

 

Najâshî, pour sa part, était certes le roi des chrétiens, mais son peuple ne le suivit jamais dans sa conversion, à part un tout petit nombre. Ses partisans étaient tellement peu nombreux qu’on ne trouva personne, à sa mort, pour prier sus sa dépouille. Ce fut le Prophète (r) qui se chargea de le faire d’où il était à Médine. Les musulmans s’étaient rassemblés pour prier à l’air libre. Il organisa les rangs, et fit la prière mortuaire. Il annonça sa mort aux fidèles le jour même de l’évènement. Voici quelles furent ses paroles : « L’un de vos frères qui était un pieux vient de rendre l’âme aujourd’hui en terre abyssine. »[9]

 

Il est mort sans n’avoir pu vivre pleinement de nombreuses lois, pour ne pas dire la plupart des lois de la religion, car il en fut incapable. Il n’a jamais fait la hijra (l’émigration ndt.), ni le djihâd, ni le pèlerinage à la Maison sacrée. Certaines annales vont jusqu’à dire qu’il n’aurait pas observé les cinq prières, ni le jeûne du ramadhân, ni verser l’aumône légale. Il avait trop peur que son peuple découvre sa conversion, et qu’il le lui reproche. Il aurait été incapable d’entrer en conflit avec eux. Une chose est sûre en tout cas, c’est qu’il ne pouvait pas régner sur eux par le Coran. »[10]

 

Pour les questions claires de la religion, le Coran suffit en lui-même pour établir la preuve céleste

 

Ibn Taïmiya explique : « Les bases fondamentales de la religion se présentent de la façon suivante : soit, il s’agit de questions auxquelles il incombe de donner foi, de prononcer verbalement, ou de mettre en pratique. Ex. : les questions qui touchent à l’Unicité, aux Attributs, au destin, à la prophétie, à l’eschatologie (la vie après la mort ndt.), ou toutes les questions qui les démontrent…

 

Toutes les questions que l’individu à besoin de connaitre et de croire d’une foi ferme ont été pleinement clarifiées par Allah et Son Messager, de sorte qu’elles ne lui offrent aucune excuse. Elles incarnent les plus grands enseignements que le Messager a clairement transmis, et expliqués aux hommes. Elles incarnent également les plus grands enseignements avec lesquels Allah a établi la preuve céleste contre Ses créatures, par l’intermédiaire des messagers qui menèrent leur mission à bien. D’une part, le Livre d’Allah qui fut fidèlement véhiculé tout d’abord par les Compagnons, puis par leurs successeurs directs, en ayant pris soin de garder intacts les termes et la compréhension que le Messager leur a transmis ; et d’autre part la Sagesse qui incarne la Tradition prophétique qui nous fut également véhiculée par ces derniers ; tous deux répondent à ce besoin d’éclaircissement de la façon la plus parfaite… »[11]

 

Or, ce discours est relatif ; il varie en fonction des endroits, des époques et des personnes

 

Ibn Taïmiya explique : « Une fois que le Coran fut entièrement révélé et que la religion fut parachevée, il est possible qu’un individu n’en reçoive qu’une partie. Dans ce cas, il incombe de croire en gros, à tous les enseignements du Messager, et en détail, à ceux qu’il connait en particulier. Quant à ceux qu’il n’a pas reçus et qu’il n’est pas dans la possibilité de connaitre, il doit y donner foi en détail s’ils venaient à lui parvenir. Un homme peur croire au Messager d’une foi ferme et venir à mourir avant l’entrée de la prière ou l’obligation d’accomplir tel ou tel acte. Dans ce cas, il est mort en ayant une foi parfaite par rapport à ce qui lui était demandé. Quand vient l’heure de la prière, on est obligé de la faire. On est ainsi soumis à un nouveau commandement auquel on n’était pas tenu auparavant… Ainsi, la foi qui incombe à la personne responsable varie d’une part en fonction des nouvelles révélations venant du ciel, et, d’autre part, en fonction de ce qui lui en parvient. »[12]

 

Le savoir minimum que chacun doit connaitre

 

Ibn Taïmiya explique : « Il incombe à toute personne responsable de connaitre ce qu’Allah lui a ordonné. Elle doit connaitre ce qui touche à la foi qu’Il lui a ordonné d’avoir, et le savoir qu’Il lui a ordonné d’avoir ; par exemple, si elle est concernée par la zakât, il devient obligé dans son cas d’apprendre ses lois ; si elle est concernée par le pèlerinage, il devient obligé dans son cas d’apprendre ses lois, etc. Il incombe à l’ensemble de la communauté d’apprendre tous les enseignements que le Messager (r) nous a transmis de façon à ne rien en perdre ; ils correspondent à tout ce qui touche au Coran et à la sunna. Néanmoins, tout ce qui vient en plus de ce que chacun doit apprendre relève de l’obligation collective. Autrement dit, si une partie de la communauté s’en charge, le reste en est déchargé. »[13]

 

« … C’est pourquoi, il incombe aux savants d’avoir un niveau de croyance qui n’incombe pas d’avoir aux gens simples, comme il ne sera pas demandé aux habitants d’un territoire où règne le savoir et la foi la même chose que ceux vivant dans un territoire où règne l’ignorance. »[14]

 

« Il n’est pas demandé à tout musulman de connaitre tout enseignement ou tout commandement qui se trouve dans le Coran et la sunna… »[15]

 

À suivre…

 

Par : Karim Zentici

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[1] Ibn Jarîr lui-même relativise, comme en témoigne son tafsîr du V. 112 de la S. el mâida où il affirme que les apôtres doutaient de la qudra d’Allah, bien que d’autres savants ne le lui concèdent pas.

 

[2] Voir : son exégèse du v. 15 de la s. Le voyage nocturne. Dans nawâqid el îmân el qawliya wa el ‘amaliya, qui est une thèse ès doctorat, le D. ‘Abd el ‘Azîz el ‘Abd âl ‘Abd e-Latîf utilise le passage suivant d’ibn Jarîr dans le livre en question, pour établir le principe du ‘udhr, en parlant de certains textes sur les Attributs divins : « … personne ne devient mécréant (ou il ne faut taxer personne de meécréant ndt.) à cause de son ignorance [sur le sujet], sauf une fois qu’il les a reçus… » Ibn el Qaïyim dans ijtimâ’ el juyûsh el islâmiya (p. 195) et e-Dhahabî également dans siar a’lâm e-nubalâ (14/280) reprennent ce passage. Il est à constater qu’il ressemble terriblement à la citation notoire de Shâfi’î sur le sujet et que nous retranscrirons dans le prochain bas de note.

 

[3] Majmû’ el fatâwa (1/121). L’Imam e-Shâfi’î a dit : « Allah le Très-Haut a des Noms et des Attributs que recense Son Livre et que Son Prophète a divulgués à sa communauté. Il ne convient à aucune créature d’Allah de les rejeter, une fois que les preuves sont établies contre elle (…) Après cela, il devient un mécréant, mais avant cela, il est excusable, étant donné que ce n’est pas un sujet que l’on peut percevoir par la raison, le rêve, le cœur ni par la pensée. Nous ne taxons aucun ignorant d’apostasie avant que les enseignements ne lui soient parvenus. » Voir : mu’tasar el ‘Ulû d’el Albânî (p. 177).

 

[4] Le bétail ; 19

 

[5] Le voyage nocturne ; 15 voir les tafsîr d’e-Tabarî et d’ibn Kathîr.

 

[6] Les femmes ; 165 voir les tafsîr d’el Baghawî et de Shanqîtî.

 

[7] Majmû’ el fatâwa (22/41) ; voir également : (2/41-42, 12/439).

 

[8] L’Absoluteur ; 34

 

[9] Rapporté par el Bukhârî (5/51), et Muslim (2/656-658), selon notamment Abû Huraïra ().

 

[10] Manhâj e-sunna (5/111-113).

 

[11] Dar-u ta’ârudh el ‘aql wa e-naql (1/27-28).

 

[12] Majmû’ el fatâwa (7/519).

 

[13] Majmû’ el fatâwa (3/328-329).

 

[14] Majmû’ el fatâwa (3/328).

 

[15] El îmân (p. 390).

LE KUFR I'RÂDH (2/3)

 

 

Il n’est pas demandé à tout le monde de connaitre le dogme en détail comme le Prophète (r), mais chacun en fonction de ses possibilités

 

Sheïkh Taqî e-Dîn nous apprend : « Ainsi, tout individu qui donne foi à Dieu est croyant proportionnellement en fonction de l’intensité de son adhésion. En outre, si la preuve céleste n’est pas établie contre lui, il ne devient pas mécréant en reniant ces enseignements que les textes font pourtant mention. Pour expliquer ce point, nous disons que la plupart des fidèles (qui font la prière) croient d’une foi ferme en Dieu et à Son Messager, bien qu’ils aient une conception différente de Leur divinité et de Ses Attributs. Nous ne parlons pas des hypocrites qui affichent la foi du bout de la langue, mais qui renient le Messager du fond du cœur ; ceux-là ne sont pas des croyants proprement dits.

 

Néanmoins, tout individu qui se revendique musulman, sans n’être un hypocrite au fond de lui, est un croyant. Sa foi sera en fonction des efforts qu’il aura fournis dans ce sens. Tôt ou tard, il sortira de l’Enfer, quand bien même il renfermerait la foi la plus infime (mot-à-mot : une foi pas plus lourde qu’un grain de moutarde ndt.). Nous pouvons compter dans cette catégorie, tous les hérétiques qui divergent dans les domaines des Attributs divins et du destin, toutes tendances confondues.

 

Si, pour entrer en Paradis, il fallait connaitre Allah aussi bien que Son Prophète (r), personne ou presque dans sa communauté n’y aurait droit. La plupart des musulmans en effet ne sont pas capables d’avoir une telle croyance détaillée. Pourtant, ils iront au Paradis, en sachant qu’ils auront des échelons différents en fonction de leur foi et de leur connaissance. Un homme peut renfermer une foi avec laquelle il connait Son Seigneur, mais l’un de ses semblables peut le dépasser dans ce domaine, alors que lui, il en est incapable. Il ne lui est pas imposé une chose qui est au-dessus de ses capacités… »[1]

 

Le nouveau converti et le Bédouin vivant loin des villes sont excusables à l’unanimité des savants

 

Ibn Taïmiya explique : « Bon nombre de gens vivent dans des endroits ou des époques où s’estompe une grande partie du savoir prophétique, de sorte qu’il n’y a personne pour transmettre les enseignements du Coran et de la sagesse qu’Allah a ordonné à Son Messager de transmettre aux hommes. De nombreux enseignements sont alors ignorés, d’autant plus qu’il n’y a personne pour les transmettre. Ce genre d’individus ne devient pas mécréant. C’est pourquoi, les grandes références sont unanimes à dire que si le Bédouin vivant loin des villes [et des savants], et, en outre, étant un nouveau converti, renie les lois évidentes et communément transmises, on ne peut le juger mécréant avant de le mettre au courant de ces enseignements prophétiques, comme en témoigne le fameux hadîth : « Il viendra une époque où personne ne connaitra ni prière ni jeûne ni pèlerinage ni ‘umra en dehors du vieil homme et de la vieille femme qui diront : « À l’époque de nos parents, les gens disaient : la ilâh illa Allah ! » On demanda à Hudhaïfa ibn e-Nu’mân (t) : « Cela pourra-t-il leur servir ?

- Cela va les sauver de l’Enfer, répondit-il. »[2] »[3]

 

Renier un point élémentaire de la religion est en principe inexcusable

 

ibn Taïmiya établit dans un passage : « Quiconque renie l’aspect obligatoire de certaines obligations notoires (ou pratiques) communément transmises (mutawâtir), comme les cinq prières, le jeûne du ramadhan, le pèlerinage à la Maison Sacrée ; ou l’interdiction de commettre certains péchés notoires et communément transmis, comme la perversité, l’injustice, le vin, les jeux de hasard, l’adultère, etc. ; ou qui conteste certaines choses licites dont la légitimité est notoire et communément transmise comme le pain, la viande, le mariage ; c’est un mécréant apostat qui doit être mis à mort s’il refuse de se repentir. »[4]

 

Même dans ce domaine, la chose est relative : celle-ci varie en fonction des endroits, des époques et des personnes

 

Pour preuve, il soutient dans un autre passage : « On ne peut taxer d’apostat (kaffar) un cas particulier avant l’iqama et hujja, comme celui qui renie l’aspect obligatoire de la prière, la zakat, et qui autorise moralement le vin, l’adultère en faisant une erreur d’interprétation (ta-awwal)… comme l’ont fait les Compagnons avec ceux qui s’étaient autorisés le vin. »[5]

 

Ailleurs, il est plus explicite : « Le fait qu’une question soit connue de façon élémentaire par tous les musulmans est, somme toute, relatif. Le nouveau converti et le Bédouin vivant loin des villes peuvent n’en avoir aucune connaissance, avant de pouvoir parler de connaissance élémentaire. Bon nombre de savants savent de façon élémentaire que le Prophète (r) a fait la prosternation de l’oubli, qu’il a jugé que le prix de sang devait être versé par le clan du meurtrier, qu’il a jugé que l’enfant naturel était affilié au lit, etc. Certes, les spécialistes connaissent ces points de façon élémentaires, mais, au même moment, la plupart des gens n’en ont jamais entendu parler. »[6]

 

« C’est pourquoi, si un homme qui se convertit ne sait pas que la prière est obligatoire, ou que le vin est interdit, il ne devient pas mécréant en croyant le contraire, et, mieux, il ne mérite aucun châtiment, pas avant que la preuve prophétique ne lui soit parvenue. »[7]

 

E-Nawawî théorise la question

 

Après avoir dressé une liste de questions connues par tous les musulmans de façon élémentaire, ce dernier nous apprend : « … Or, si le nouveau converti, qui ne connait pas l’Islam dans ses détails, renie l’un de ces éléments par ignorance, il ne devient pas mécréant (hukm ndt.), et garde le nom de musulman (ism ndt.) comme ceux que nous avons cités… »[8]

 

Plusieurs savants à travers diverses époques (Bahâ e-Dîn el Maqdisî, e-Suyûtî, ‘Alî el Qârî, ibn Qudâma el Maqdisî) donnent l’exemple du nouveau converti et du bédouin qui vit loin des villes pour dire qu’il ne devient pas kâfir, avant iqâma el hujja, pour faire la distinction entre lui et l’apostat (murtadd). Il n’y est pas question de distinction entre l’ism et le hukm. Pour mieux comprendre, il faut revenir à la définition du murtadd que nous proposent plusieurs savants. Tous s’accordent à dire qu’au niveau de la langue, apostasier, c’est revenir sur quelque chose dans l’absolu. Dans la religion, il consiste à renoncer verbalement à la religion ou dans les actes.[9]

 

Ibn el ‘Arabî applique ce principe au shirk

 

Le savant andalou est l’auteur des paroles : « Si l’ignorant ou celui qui commet une erreur parmi les adeptes de cette communauté, fait un acte de kufr ou de shirk qui en principe, le rend soit mushrik soit kâfir, il est excusable en raison de son ignorance et de son erreur (ya’dhur bi el jahl wa el khata) jusqu’à ce que lui soit établit de façon claire et limpide, loin de toute confusion, la preuve d’Allah qui voue à la mécréance celui qui ne s’y soumet pas ; et qu’il renie ensuite un point élémentaire de la religion (ma’lûm min e-dîn bi e-dharûra), relevant du consensus recensé de façon sûre, et que tout musulman connait machinalement et sans réfléchir. »[10]

 

Ibn Hazm un autre andalou, a un discours qui va dans ce sens.[11]

 

Sheïkh el ‘Uthaïmîn l’applique également au shirk

 

Qu’on en juge : « Néanmoins, certains ignorants n’ayant aucune ambiguïté sont convaincus de détenir la vérité (que ce soit au niveau de la croyance ou des paroles). Il va sans dire qu’ils ne cherchent nullement à aller à l’encontre de la religion, ni de sombrer dans le péchés et la mécréance. Nous ne pouvons les condamner à la mécréance quand bien même ils ignoreraient un fondement de la religion. Re(-)connaitre la zakât et son caractère obligatoire est l’un de ces crédos fondamentales, on peut l’ignorer tout en restant musulman.

Ainsi, nous pouvons mieux appréhender la situation de nombreux fidèles à travers diverses contrées islamiques où le recours aux morts (el istighâtha bi el amwât) est monnaie courante. Ils ne savent pas que ces pratiques sont interdites. On leur fait même miroiter qu’elles rapprochent d’Allah, et que certains occupants des tombes sont des walis, etc. Ils adhèrent pourtant à l’Islam et font preuve d’un grand zèle vis-à-vis de ses enseignements. Ils sont convaincus de faire le bien, et personne ne les a prévenus du contraire. Ils sont donc excusables, contrairement à l’entêté qui lui est condamnable ; il sait très bien que les savants disent que c’est du shirk, mais il préfère s’en tenir aux coutumes de ses ancêtres. Celui-ci est directement concerné par le Verset : [Nous avons trouvé nos pères sur une voie, et nous nous contentons de suivre leurs traces].[12] »[13]

 

Par : Karim Zentici

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[1] Majmû’ el fatâwa (3/328).

 

[2] Rapporté par ibn Mâja (4049) ; Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans silsilat el ahâdîth e-sahîha (87), et sahîh el jâmi’ (6/339).

 

[3] Majmû’ el fatâwa (11/407-408).

 

[4] Majmû’ el fatâwâ (11/405).

 

[5] Majmû’ el fatâwâ (7/619).

 

[6] Majmû’ el fatâwâ (13/118).

 

[7] Majmû’ el fatâwâ (11/407).

 

[8] Sharh e-Nawawî (1/205). Il dit mot à mot : baqâ ism e-dîn ‘alaïhi. Juste avant, Nawawî affirme au sujet de celui qui ne reconnait pas le troisième pilier de l’Islam : « Ainsi, nous pouvons dire la même chose concernant tous ceux qui renient un élément connu de façon élémentaire de la religion, dans la mesure où sa connaissance est répandue : comme les cinq prières, le jeûne du ramadhân, la grande ablution après les rapports sexuels, l’interdiction de l’adultère, l’alcool, le mariage consanguin, etc. Cela ne concerne pas ceux qui viennent d’embrasser l’Islam et qui ne connaissent pas ses lois. Les renier avec ignorance ne rend pas mécréant. » Sharh sahîh Muslim (1/205). Ibn Qudâma a également un discours qui va dans ce sens. Voir : el mughnî (8/131).

 

[9] ‘âridh el jahl (p. 345).

 

[10] Voir : tafsîr el Qâsimi (5/1307-1308). Sheïkh Sulaïman ibn Sahmân rapporte des paroles d’ibn Jarjîs qui ressemblent étrangement à celles-ci : « Il n’est pas simple de kaffar le musulman. Les savants, comme Sheïkh ibn Taïmiya et ibn el Qaïyim, sont unanimes à dire que l’ignorant et celui qui commet une erreur et appartenant à cette communauté, fait un acte qui, en principe doit le rendre mushrik ou kâfir, est excusable (ya’dhur bi el jahl wa el khata), jusqu’à ce qu’il ait connaissance de la preuve prophétique de façon claire et limpide et qu’il n’ait aucune confusion sur la question. » Dhiyâ e-Shâriq (p. 371-372).

 

[11] El fisal d’ibn Hazm (3/302).

 

[12] Les ornements ; 22

 

[13] Sharh el mumti’ (6/194).

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